Iran, les rives du sang
de Fariba Hachtroudi

critiqué par Darius, le 9 avril 2001
(Bruxelles - - ans)


La note:  étoiles
Les confidences du vagin
Rédigée en français par une Iranienne, docteur en archéologie, c'est la chronique la plus féministe, la plus noire que j’ai jamais lue.
Des vies de femmes dans un enfer d'hommes…
A sa lecture, on n'en sort pas indemne.
" S'ils faisaient correctement l’amour dans ce pays, il y aurait peut-être moins d’obsédés sexuels, de sados et de tortionnaires ".
Voilà qui annonce la couleur de ce roman construit pourtant comme un roman policier. Un obscur inspecteur de police, au seuil de la retraite, se passionne tout à coup pour " une suicidée " comme il y en des milliers dans ce pays, décidé à éclaircir une enquête classée et archivée par les services secrets iraniens. Il se mue en détective privé pour élucider le " suicide " proclamé et nous tient en haleine tout au long du roman. À qui profite le crime ? Voilà le leitmotiv. C’est finalement une remise en question de sa vision faussée de cette société machiste qu’il trouvera au rendez-vous.
Une gynécologue, nièce de la victime, nous fera voyager dans l’univers glauque des utérus, tabernacles des secrets du monde depuis l’aube des temps :
Les vagins béants des femmes-usines réduites aux bas-ventres propices à fabriquer des mâles-soldats…
Les utérus, blessures béantes, minées d’armes a feu, où se lisent les récits des viols, des tortures, des ravages subis… et qui mettent bas des engins de guerre ou des cadavres.
Les vagins coffres-forts des fugitives, bourrés de trésors, diamants, saphirs, rubis, opalines… Et ces mêmes fuyardes pillées par des bandits qui savent les faire " accoucher "…
Tout au long du roman, elle fustigera avec une rare violence tous les mâles du pays qui permettent le mariage de petites filles de 8 ans à des violeurs décatis...
Pourquoi le plaisir des femmes fait-il aussi peur ? Pour mieux leur faire gober les lois de la souffrance. Quand on n’a pas connu le plaisir, même la torture paraît naturelle.
Les mollahs, elle les vomit: " ils sont et resteront toujours de misérables pouilleux qui se branlent dans les alcôves de leurs écoles religieuses miteuses, taudis peu recommandables bourrés à ras bord d'obsédés sexuels et de fêlés. Si seulement on pouvait leur inventer une machine émancipatrice capable de transformer leur cervelle de Cro-Magnon en cerveaux d’Homo Sapiens " !
Dévorer des films pornos pour jeter avec plus de fureur les pierres destinées à ensevelir la dernière des infortunées condamnée à mort pour délit d'adultère est la grande spécialité de ces " chers dirigeants ".
Elle terminera par un plaidoyer pour l’amour physique qui est la clé d’accès du royaume de la liberté, " mais peu d'hommes dans le pays sont capables d'aimer une femme car ils souffrent de 3 pêchés capitaux: la possessivité, la jalousie, le doute, sans même parler du machisme ".
Ah, si " Christo ", cet architecte de génie pouvait bander la ville sous un tchador géant, on verrait la Cite des Rêves sous son tchador de deuil afin de dissimuler les affreuses tumeurs de ses taudis.
L’épilogue de ce roman empli de souffrances des femmes pourrait se lire ainsi : le plus grand scandale du siècle est le règne de l'inquisition islamique.
Personnellement, je ne crois pas que tous les pervers du monde se soient concentrés en Iran, mais il est certain que ce système de perversion, réprimé dans nos pays, reste là-bas, non pas érigé en modèle, mais du moins largement toléré, permis et autorisé au nom de la suprématie de l'homme et de sa toute puissance, quoi qu'il fasse…
Quelle critique ! 8 étoiles

Cette critique est merveilleusement bien faite ! On y sent une gigantesque passion, l'énorme noeud à l'estomac,de la personne qui l'a écrite et on est révolté avec elle ! Plus qu'une seule chose à faire: se ruer acheter ce livre et le lire !

Jules - Bruxelles - 80 ans - 13 avril 2001