La chambre des officiers
de Marc Dugain

critiqué par Phil_Hippo, le 15 avril 2001
(Tousful - 45 ans)


La note:  étoiles
Un livre original, surprenant et surtout émouvant
En 1914, Adrien, la vingtaine, est mobilisé pour le front comme tous ceux de son âge.
La guerre n’a pas encore vraiment commencé, mais il s’agit de se préparer pour empêcher l’ennemi de passer la Meuse. Adrien effectue des reconnaissances sur le bord du fleuve lorsqu’un obus s’écrase à ses côtés. Quand il reprend conscience, il n’a plus de visage. Sa mâchoire supérieure est partie en morceau dans l’explosion. Il n’a plus de palais, à la place c'est un grand vide.
À tel point défiguré qu'il arrive à passer la langue par son nez.
Adrien est désormais « hors combat », il ne connaîtra pas les tranchées.
Et pourtant…
Il y a une autre guerre à mener.
L’ennemi cette fois est intérieur.
Adrien doit maintenant, avec sa gueule de monstre apprendre à vivre. Dugain raconte alors l’autre côté de la guerre. Pas celle des héros, des morts au combat ou dans les camps, mais celle d’un rescapé. Beaucoup dans l’hôpital qui comme Adrien sont défigurés, vont se donner la mort en découvrant leur visage dans le regard des autres. Adrien quant à lui avoue : « je n'ai pas eu le courage de me suicider.
J'ai eu le courage de ne pas me suicider ». Quand les gens le regardent, ils en ont peur. D'ailleurs, c'est bien simple, on ne le regarde plus.
Marc Dugain, dans ce qui constitue son premier roman, nous raconte une guerre.
Celle de 14, des « tranchées boueuses ». On s’attend alors à un roman historique. Pourtant, il n'en est rien. Dugain a bien compris que l’histoire ne se résume pas à des dates ou à des faits. La guerre prend ainsi une toute autre dimension. On sent dans ce livre toute la tragédie humaine d'une guerre. En lisant, on se glisse dans la peau d’Adrien. Et comme lui, on se demande comment encore vivre avec un tel visage, ou plutôt avec ce qui en reste.
Ce livre est hors du commun pare que s'il prend un thème romanesque ordinaire ; l’histoire, elle, est hors du commun. Lorsqu'on est jeune et qu’on n'a connu aucune guerre, il est parfois difficile de s’imaginer toutes les atrocités qu'elle engendre. Après ce roman, une chose est sûre, c’est que jamais je ne voudrai avoir affaire à elle.
Une connaissance nécessaire 7 étoiles

Prendre connaissance des atrocités d'une guerre, de surcroît quand le conflit armé a touché son propre territoire, s'avère nécessaire. Le caractère romancé de ce livre donne davantage de force, tout en gardant une distance, utile, voire indispensable.
Après, cela reste dur à avaler. Certaines descriptions donnent fatalement des sueurs froides.

Veneziano - Paris - 47 ans - 27 février 2016


Affronter le regard des autres 8 étoiles

Quelle leçon que ce livre !
Courage exceptionnel que celui d'Adrien et de ses compères, amis et frères. Comme cela a été dur pour eux de reprendre une vie "normale", avec leurs "gueules cassées" par cette horrible guerre. Il faudrait nous mettre à leur place cinq minutes, et deviner nos réactions. Celle de baisser les bras, d'abandonner, de se supprimer ? Certains l'ont fait, hélas, ne pouvant supporter le regard des autres, de la famille, des proches. D'autres, comme ces hommes, ont affronté. Adrien est touchant, il regrette d'avoir subi ces blessures alors qu'il n'a même pas vu un seul instant l'ennemi, et se pose de multiples questions quant à la légitimité de son statut.
Vraiment, une belle leçon de vie, car derrière leurs visages abîmés demeurent leurs âmes, leurs personnalités, leurs pensées qui ne manquent pas d'intérêt.

Nathafi - SAINT-SOUPLET - 57 ans - 13 septembre 2015


Un instant d'humanité 10 étoiles

Après avoir lu AU REVOIR LA-HAUT de Lemaitre, je voulais rester dans le même thème en lisant LA CHAMBRE DES OFFICIERS.

C'est difficile d'exprimer ce que je ressens et dire que "c'est beau, c'est puissant" parait banal et ne rend en rien l'impression qu'a suscitée sur moi ce livre.

Une belle leçon d'humanité que nous livrent ces hommes marqués au plus profond de leurs chairs par la guerre.

Ce qu'ils ont souffert est effroyable et pourtant ce sont eux qui donnent l'espoir et font rire les autres !

Comment ne pas en tirer des leçons pour nous et nos petites vies.

Odile93 - Epinay sur Seine - 70 ans - 7 juin 2014


Les gueules cassées... 6 étoiles

En 1914, Adrien Fournier, Ingénieur des Ponts et Chaussées, fait une reconnaissance sur le front qui n'en est pas encore un. Un éclat d'obus lui emporte le bas du visage, le laissant défiguré. Premier officier blessé transféré au Val de Grâce, il y passera les cinq années de guerre et verra se succéder les gueules cassées : certains resteront là, d'autres y mourront ou retourneront au front. Penser aux anciennes amours, nouer de nouvelles amitiés, se raccrocher à la vie comme on peut.
Livre fort, émouvant et sublime, très bien écrit. Marc Dugain a su composer des personnages de caractère, meurtris dans leur chair et leur esprit mais toujours pleins d'humanité. A lire absolument. Vous pouvez également voir l'adaptation ciné, assez fidèle au roman, mais un film ne remplace jamais un livre, enfin vous faites comme vous voulez !
Est ce une coïncidence si le héros s'appelle Adrien Fournier et si Alain Fournier (Le grand Meaulnes) a été tué dès les premières escarmouches de l'automne 1914 ?

Homo.Libris - Paris - 58 ans - 27 février 2014


L'expérience d'un blessé pendant la guerre 14-18 7 étoiles

Ce roman ne décrit pas la guerre mais l'expérience d'une "Gueule cassée" dans un hôpital pendant la guerre. Dans la chambre des officiers dans l'hôpital du Val-de-Grâce, le personnage principal, Adrien Fournier, se liera d'amitié avec d'autres gueules cassées. Ils livreront un combat intérieur : surmonter le regard des autres. Ce livre témoigne des souffrances causées par la guerre et surmontées par la fraternité. 3,5/5.

Marcel11 - Paris - 26 ans - 20 octobre 2013


La chambre des suppliciés. 8 étoiles

Ecrivain français né en 1957; Marc Dugain commence une carrière littéraire en racontant le destin de son grand-père maternel, «gueule cassée» de la guerre de 14-18: ce sera La Chambre des officiers, publié en 1999 et qui le fera connaître.
Dès lors, il se consacre avec succès entièrement à l'écriture en traitant des sujets très différents.

La guerre 14-18 n'est pas encore officiellement déclarée. Adrien est en reconnaissance sur un chemin de halage qui longe la Meuse quand il est fauché par un obus allemand.
Il reprend connaissance à l'Hôpital du Val de Grâce à PARIS, profondément mutilé (Destruction maxillo-faciale).
Débute alors un long combat médical et psychologique.
La douleur dans le regard de l'autre.
"Chacun d'entre nous devient le miroir des autres".
Sur le chemin de la déchéance, suicides et agonies se côtoient au quotidien.
Adrien, Henri de Penamster, Pierre Weil et Marguerite associent leur douleur pour affronter le monde. "L'escadron des naufragés se met en marche ". Ils sont les derniers des vivants. Leur entrain est l'apanage de ceux qui sont débarrassés de leur image.

Un court roman sur les "gueules cassées" de la Guerre 14-18. Sa force réside dans le juste équilibre entre compassion et optimisme.
J'avoue avoir été ému par cette oeuvre intelligente et sensible.

Frunny - PARIS - 59 ans - 25 février 2013


Gueules cassées. 5 étoiles

Je viens de terminer " La chambre des officiers " . Je n'ai pas été charmé par l'écriture. Elle est assez conventionnelle et ne m'a procuré aucune joie ni aucune surprise. La compassion avec Adrien est indéniable, pauvre homme, mais jamais l'empathie. J'irai même jusqu'à dire que d'user d'un sujet aussi sensible pour un roman me paraît facile. L'unanimité est quasi acquise, comme l'autisme, la mort ou la Shoah. Cela ne fait pas, à mon goût, de ce livre un grand livre et j'ai été déçu. Je m'attendais à des uppercuts, j'ai seulement senti le vent du boulet.

Hexagone - - 53 ans - 20 novembre 2010


Des survivants sans visages. 10 étoiles

Le XXe siècle rentra de plein fouet dans l’horreur de la guerre industrielle de masse.

Les Nations et, en particulier la France, avec ses soldats en pantalons rouges et en casquettes en guise de couvre chef, se fracassèrent brutalement contre la réalité de la guerre moderne et l’industrie de masse naissante. Krupp travaille l’acier, Taylor et Ford inventent le travail à la chaîne avec le découpage des tâches. On produit plus, en masse, et mieux. L’Allemagne est déjà, à l’époque, une immense puissance industrielle. C’est bientôt l’ère de l’automobile et de l’aviation. De nouvelles techniques de guerre apparaissent. Cette puissance industrielle avec ses machines, ses canons, son métal en fusion et bientôt le développement de la chimie, vont être projetés à grande vitesse et avec violence sur quoi ? Tout simplement des visages et des corps de pauvres jeunes innocents de 20 ans faits de chair et de sang qu’on envoyait sans protection à la boucherie.
A la fin de l’année 14, l’État Major Français comptabilisait déjà des milliers de mort sur le front, des régiments entiers détruits et constatait avec surprise que « le feu tue ». Les casques pour protéger les têtes des combattants de ce déluge de feu n’arriveront qu’à la fin de l’année 1915….

Au début de la guerre, l’armée française s’était pris une telle saignée que sans une erreur du commandement Allemand (en particulier à cause de la rivalité entre deux généraux; Von Kluck et Moltke) et sans le génie du Général Galliéni qui su convaincre Joffre et profiter de l’occasion, la bataille de la Marne n’aurait pas eu lieu et Paris aurait été occupé dès le début des hostilités (comme en 1870 et en 1940).

« La chambre des officiers » de Marc Dugain, raconte l’histoire d’Adrien qui sans avoir jamais vu un ennemi en face sera une victime de cette tragédie.
Son visage sera emporté par un obus dès le début de la guerre.

C’est l’histoire de ses survivants qui sont revenus du front sans visages. C’est les prémices de la chirurgie maxilo-faciale.

Dans les années 20, ils seront des milliers à errer avec des gueules cassées (cette guerre fera des millions d’invalides) rappelant à tous ce que fut l’horreur de cette guerre et ce que peut donner la modernité et donc ce que pourrait être la prochaine guerre. On le verra 20 ans plus tard quand une industrie employée à mauvais escient aboutira carrément à l’idée de l’industrialisation de la mort avec l’invention des camps. De pire en pire dans l’horreur.

Chene - Tours - 54 ans - 6 juin 2010


Récit émouvant 8 étoiles

Vraiment émouvant car le fait de lire l'histoire de cet homme défiguré à vie et obligé de voir la peur dans le regard des autres est poignant. Quel courage il a dû avoir. Livre assez court mais prenant.

Lalie2548 - - 39 ans - 6 mai 2010


Très bon roman 9 étoiles

Adrien Fournier a un bel avenir devant lui : jeune, ingénieur en génie civil. Comme des milliers d'hommes, il est mobilisé dès 1914 mais lui ne connaîtra bataille : au cours d'un repérage sur les rives de la Meuse, il est blessé par un éclat d'obus et transféré au Val de Grâce dans La Chambre des officiers.

Ce roman est inspiré directement de l'histoire familiale de Marc Dugain, de celle que l'on transmet à son fils ou à son petit-fils. Le grand-père maternel de l'auteur a été sa principale source d'inspiration : c'était une Gueule cassée. Tout le monde a entendu au moins une fois dans sa vie cette expression.

Dugain entraîne son héros vers un combat intérieur, un combat contre lui-même où l'acceptation de soi lutte face au regard des autres. L'écriture sobre de l'écrivain m'a profondément émue. Les faits sont décrits de manière simplissime et chaque mot est à sa place. J'ai beaucoup, beaucoup aimé...

Fanyoun06 - - 55 ans - 21 mai 2009


Excellent... 9 étoiles

Un des rares livres sur la Première Guerre Mondiale...
Elle a été meurtrière, a détruit des vies et des familles, et pourtant, on n'en parle quasiment jamais. La Deuxième Guerre Mondiale a fait plus de dégâts dans les esprits.
La Première Guerre Mondiale est pourtant les débuts de la guerre moderne avec ses chars, son aviation, ses armes modernes, ses armes chimiques... et les débuts de la chirurgie esthétique, si bien évoqués dans La Chambre des Officiers.

Sally-Ann - - 41 ans - 5 janvier 2005


Ambivalence. 5 étoiles

Adrien, le personnage principal, défiguré par un éclat d'obus, se retrouve dans un service spécial réservé aux mutilés du visage. Le roman n'a pas de mal à entrer dans le vif du sujet et en quelques pages, nous nous retrouvons en train de lire l'accident. Donc, la mise en place est très rapide et efficace. Les passages qui auraient pu être narrés avec crudité sont très subjectivement expliqués, ce qui laisse une certaine liberté de l'imaginaire. A mon sens, l'esprit "fraternel" des hommes qui vivaient à cette période de l'histoire, n'est pas assez franche et assez profonde. La dualité entre la peur de la guerre, la joie de la victoire, l'appréhension du regard des autres, l'angoisse de la mort; et bien tout ça donne à ce roman une sorte de consistance très intéressant. De plus, il se lit très vite.

Niddle - Le Raincy - 45 ans - 14 janvier 2004


La guerre .... 9 étoiles

Au travers de cette reconstruction, on découvre un autre visage de la guerre et aussi de ses victimes. En effet, Adrien, blessé avant le début des hostilités va passer la guerre au Val de Grâce à se faire refaire un visage, lui la "gueule cassée" ... On prend peu à peu conscience de ce que peut être une vie avec la moitié d'un visage, et on se prend à envisager sa propre figure sans machoire, sans nez, ou alors brûlée ... Un vrai témoignage d'humanité poignant....

Ondatra - Tours - 43 ans - 12 juin 2003


Un autre regard ? 8 étoiles

Les "gueules cassées", ce sont ces gens qui n'ont plus de visage humain, ces gens qui complètement défigurés lors de la grande guerre ont pris l'apparence de monstres.C'est l'histoire du livre. Adrien, jeune ingénieur, est envoyé en mission sur les bords de la Meuse pour examiner les possibilités d'établir un pont flottant. Nous sommes dans les premiers jours de la grande guerre. Celle qui ne devait durer que quelques temps ! Un obus éclate à proximité d'Adrien et lui arrache une partie du visage. Il se retrouve à Paris à l'hôpital du Val-de-Grâce dans l'unité spéciale destinée aux gueules cassées. Unité où les miroirs sont retirés des murs. Adrien y restera pendant toute la guerre. Il y sera même décoré alors qu'il n'a pas vu un allemand !!! Après la guerre, il retournera dans sa famille, se mariera et aura même un enfant. Histoire somme toute très simple. Oui mais, imaginez-vous avec à la place de la bouche et du nez, un trou. Un trou qui fait que lorsque vous tirez la langue, elle sort par vos sinus. Imaginez qu'on vous donne à manger des aliments broyés par vos sinus(Nous sommes en 1914, la médecine est loin, très loin de ce que nous connaissons aujourd'hui). Vous pourrez alors saisir toute l'horreur non seulement physique mais surtout morale qu'on à subir ces gens. Prononcez un D ou un T, vous conviendrez que sans palais.... Il doivent réapprendre à vivre avec eux-mêmes, s'accepter. Tout le livre est traversé par cet aspect humain des choses.
Ce livre, premier ouvrage de Marc Dugain, nous plonge au coeur d'une série de sentiments allant de l'abattement total et au dernier échelon: le suicide, jusqu'à l'amitié qui en ressort grand vainqueur car elle permettra à ces "monstres" de s'accepter. On en arrive même à vouloir rencontrer Adrien pour le féliciter de la leçon de vie qu'il nous donne. Ecrit dans un style simple mais direct, ce livre à vraiment beaucoup de mérite. Un must !

Otbest - Bruxelles - 68 ans - 31 janvier 2002


de la dignité humaine 8 étoiles

1914, Hôpital Val-de-Grâce, troisième étage, celui où l’on soigne " les esquintés de la trogne ", où le miroir est maudit , et où Adrien passera ses années de guerre.
Cinq ans où se nouent d'irréductibles liens, une intimité rare, des sentiments profonds d'amitié faits de petites choses, de regards, de propos mesurés, de parties de belote, mais dont l’intensité sera éternelle. Nul, à cet étage , ne cèdera à l’apitoiement ni au désabusement.
L'auteur livre la quintessence de la destinée tragique de son grand-père: la profonde conviction qu'au pire , le meilleur reste scellé. Le destin cruellement absurde d'un jeune français comme il y en eut tant, n'appelle ni pitié ni compassion, mais au contraire force l'admiration devant tant d’humanisme, de valeurs humaines profondément positives.
Un livre pesant de dignité .

Zoom - Bruxelles - 70 ans - 7 octobre 2001