Chaque jour ou presque, Einar s'assoit dans le fauteuil installé au pied de l'arbre qui couvre de ses branches les tombes de sa femme et de son fils. Là, il partage son quotidien avec eux, mais surtout il leur dit combien ils lui manquent. Einar est un taiseux de nature.
Chaque jour ou presque, Griff observe sa mère qui trébuche sur tous les hommes qu'elle fréquente. Tous les matins, elle prépare sa valise au cas où il leur faudrait décamper dare-dare. Griff est une jeune de fille de neuf ans qui pose un regard lucide sur le monde qui l'entoure.
Chaque jour ou presque, Jean (la mère de Griff) s'efforce de trouver une solution pour s'extraire de la spirale infernale dans laquelle elle a sombré depuis la mort du père de Griff. Les coups sont devenus trop durs à encaisser. Elle sait qu'elle doit se sauver d'elle-même et surtout sauver sa fille du chaos.
Chaque jour ou presque, Mitch endure des souffrances terribles depuis le jour où un ours l'a lacéré. La plupart du temps il demeure dans sa chambre où il façonne des bois de cerf. Einar vient chaque jour le frictionner pour le soulager et lui injecter une dose de morphine avant que la douleur ne devienne trop difficile à supporter et ne le terrasse complètement.
Après une énième bagarre avec sa brute d'amant, Jean décide de fuir avec Griff. Toutes les deux partent en coup de vent loin de cette existence délabrée, direction la côte Ouest. Mais les choses ne se passent pas comme prévues, la voiture tombe en panne et il ne leur reste qu'une poignée de dollars. Jean décide de faire bifurquer leur destin vers le Wyoming.
L'accueil qu'Einar fait à Jean est glacial, il ne lui a jamais pardonné la mort de son fils. Einar apprend par la même occasion qu'il a une petite fille. La réapparition de Jean et la connaissance de Griff sont un coup rude pour Einar qui est habitué à mener une vie éloignée du tumulte extérieur. Mais il n'en montre rien et accepte de les accueillir momentanément. Ici on ne refuse jamais son aide à quelqu'un qui en a besoin.
Les personnages sont tous meurtris par le poids d'un passé douloureux souvent indicible. Au fil des jours ils vont tenter de s'apprivoiser les uns et les autres, de se reconstruire malgré les nombreuses cicatrices qui zèbrent leurs corps et leurs âmes. Le pardon, envers l'autre et soi-même, devient dès lors une quête du Graal, un chemin vers la réconciliation avec la vie. Bien qu'il n'y ait rien de très original dans cette histoire, somme tout basique, c'est le regard que porte Griff sur le monde des adultes qui fait vibrer la corde sensible du lecteur prêt à accueillir l'émotion sincère et débarrassée des rebuts de la compassion dégoulinante. Griff est une jeune fille sensible et à l'esprit très vif qui croit profondément que tout est possible quand on le souhaite. Une naïveté qui fait du bien dans ce monde où l'absurdité côtoie le cynisme. Un bon roman au style sobre et efficace, qui offre un bon moment de lecture.
Heyrike - Eure - 57 ans - 8 mars 2015 |