Terre de personne
de Eduardo Antonio Parra, Jean Bernier (Traduction)

critiqué par Tistou, le 21 juin 2005
( - 68 ans)


La note:  étoiles
10 Nouvelles.
E. A. PARRA est un jeune auteur mexicain de 40 ans. Terre de Personne est son premier livre traduit en Français. Il a, par ailleurs, déja écrit 2 autres recueils de nouvelles et un roman.
Le personnage de ces 10 nouvelles, c'est le Mexique, le Nord-Mexique où il vit. Le Nord-Mexique où, ce qui peut être vrai et cohérent d'un côté du Rio Bravo, peut s'avérer différent et irréel de l'autre côté.
Désespoir, fatalisme, misère, pauvreté, mirage du miracle américain de l'autre côté du Rio Bravo ; les nouvelles de Parra ne font pas dans le sentimentalisme ou l'exotisme à bon marché. C'est la triste réalité d'un peuple pauvre, confronté à un Eldorado sur sa frontière Nord, qui attire les plus miséreux comme une lumière la phalène. Une vieille femme, face au Rio Bravo, qui passe ses journées à attendre son mari parti il y a des années et à qui on attribue des pouvoirs particuliers. Un village qui a trouvé, en la personne d'un ex-instituteur diabolisé parce que ses élèves ont péri lors d'une excursion, le souffre-douleur, exutoire de toutes leurs misères. La vie, en dehors du réel, de 2 clochards et leur triste fin. Un travesti prostitué racketté et son univers misérable ...
"D'en bas, elle contemple l'ombre double des policiers qui s'agrandit et se rapetisse comme s'il s'agissait d'un seul spectre à 2 têtes. Elle ne distingue pas non plus leurs visages. Elle est sûre qu'ils ne voient également que sa silhouette prostrée. Ils la regardent et ils sourient. Se moquent de sa candeur, de son incapacité à tenir sa langue qui toujours lui a attiré les pires ennuis. Idiote, ils ne vont rien lui laisser. La rancoeur commence à lui former des vagues dans son estomac. Pour un instant, elle a envie de se lever et de réagir comme un homme. Ca serait facile, c'est la dernière chose à laquelle ils s'attendent. Un bon coup dans la gueule du sergent, en plein dans ce sourire de crétin, puis lui arracher la torche et leur fracasser le crâne jusqu'à les laisser étendus bien froids au milieu des arbres. Mais cela fait si longtemps qu'elle ne s'est pas battue qu'elle ne saurait plus comment faire. Ils m'ont bien baisée, c'est pour ça qu'ils rigolent ...

Ecrit sans illusion mais bien écrit. Lucide et cauchemardesque.