Les imposteurs, tome 3 :
de Christian Cailleaux

critiqué par Shelton, le 7 août 2005
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Etes-vous un imposteur ?
Les Imposteurs est une petite série qui doit avoir une place particulière dans la bande dessinée. Petite par la taille, le nombre d’albums, non par la qualité. En effet, pour une fois, je vous parle d’une série qui est terminée, il n’y aura que trois albums et les trois sont actuellement disponibles en librairie. C’est acquis. D’ailleurs, on ne devrait pas dire trois albums, trois tomes ou trois livres, dans ce cas spécifique, on doit dire trois actes…
En effet, Christian Cailleaux nous écrit presque une pièce de théâtre. Le théâtre a un grand rôle dans son récit et pas seulement parce qu’un de ses personnages est une actrice de théâtre. Non, en fait, c’est parce qu’il a décidé de nous parler de nous, de notre rôle dans ce monde, dans la société : et si durant notre vie, chacun d’entre nous ne faisait que jouer un rôle. On peut aussi énoncer les choses de façon différente : nous arrive-t-il dans notre vie d’être nous-même, c’est à dire autre chose qu’un être en perpétuelle représentation ? Oui, c’est bien d’une bande dessinée philosophique dont je vais vous parler aujourd’hui…
Alors pour le faire, pour que le lecteur ne se prenne pas trop la tête, l’auteur, Christian Cailleaux, homme qui fait tout, texte, dessin et couleurs, nous parle d’un personnage. C’est un homme qui travaille aux docks de la ville, un de ces hommes qui chaque matin va chercher du travail et qui en obtient en fonction des arrivées de cargos… Pour arrondir ses fins de semaines, il va faire de la musique dans une petite boite à jazz… Une petite vie, en somme… Les femmes ? Oui, de temps en temps, mais rien de sérieux… Des espérances, des fantasmes, des joies ? Oh ! Tout cela c’est pour les autres…
Oui, mais un jour, notre homme, dans la rue, est pris pour un écrivain célèbre dont tout le monde parle : le voilà prenant pour un instant – enfin, c’est ce qu’il croyait – le rôle d’Albert Fenta, écrivain connu !
Mais voilà, c’est agréable de prendre la place de quelqu’un, de se mettre à fréquenter le beau monde, de profiter de soirées bien arrosées, d’oublier sa modeste condition… On a d’autant plus envie que ça continue, quand on rencontre quelqu’un qui a compris que vous n’êtes pas Albert Fenta mais qui vous promet de vous aider à l’être encore mieux… Oui, un maître en imposture, un homme qui prétend que tout le monde commet, un jour ou l’autre, une imposture…
Notre homme se laisse faire, se laisse prendre au jeu, pour finalement aller au bout de l’imposture, celle qui relève de la malhonnêteté, de l’arnaque, mais qui donne la possibilité de prolonger à vie l’imposture… L’élève dépasse le maître, mais ils se retrouvent ensemble à la fin pour profiter de leurs impostures, à moins, mais c’est le plus probable, qu’ils ne puissent plus jamais être eux-mêmes et qu’ils soient obligés de continuer ce petit jeu là…
C’est donc une très belle série bédé, qui donne beaucoup de plaisir au lecteur et peut alimenter, s’il le souhaite, sa réflexion personnelle…