Un été andalou et autres aubergines
de Iō Kuroda

critiqué par Shelton, le 11 août 2005
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Ah ! ces légumes...
Si nous parlions de littérature en général, je vous dirai que ce livre, « Un été andalou et autres aubergines » est un recueil de nouvelles. Mais comme nous parlons de mangas, c’est assez délicat pour moi de vous parler de nouvelles. Pensez donc, les mangas ne sont déjà même pas des livres, alors pourquoi parler de nouvelles ? Je vous le demande bien !
Mais justement, je le fais, oui, il s’agit bien de nouvelles… D’abord parce que les mangas appartiennent bien à la catégorie générale des livres, même s’ils se lisent à l’envers, en quelque sorte. Deuxièmement, parce que les Japonais qui en écrivent nous racontent des histoires, avec un mode narratif particulier, le leur, mais de toute évidence, ce qu’ils nous offrent appartient bien à la littérature. Enfin, parce que je ne connais qu’un seul mot pour décrire ces petites histoires de Iô Kuruda, les nouvelles…
Dans ce tome 1, il y en aura 3, il va nous parler, plus exactement, faire vivre quelques personnages, en particulier un homme, ce que l’on pourrait appeler un intellectuel, qui cultive des aubergines. Pourquoi des aubergines ? J’ai longuement cherché si ce légume avait une particularité dans la culture japonaise, mais il semblerait que non… En fait, il fait pousser des aubergines, mais on pourrait remplacer aubergines par courgettes et rien ne changerait dans les nouvelles… Mais ce que j’aime avant tout c’est la philosophie de cet homme, une sorte de stoïcien, même si j’ai quelques scrupules à utiliser des noms de philosophies occidentales pour parler d’un Japonais…
Dans la première histoire on le voit confronté à deux jeunes en errance, en vadrouille, qui ne viennent de nulle part et qui ne savent pas où aller. C’est l’occasion pour lui de parler travail, avenir, amour, alimentation, livres… et pour nous lecteur de mesurer l’écart entre deux générations, une qui a réussi, qui a fait des choix, qui semble maîtresse de son destin, même si c’est une illusion, une autre qui ne vit qu’au jour le jour, qui est rébellion permanente contre la société, qui est perdue, que l’on ne peut pas sauver… Constat d’échec devant ce malaise, ce mal-être… La société japonais a du mal à passer un cap, on le sent bien dans cette nouvelle et je pense qu’il serait illusoire de penser que notre occident est dans une toute autre situation…
Les autres nouvelles ne sont pas toutes aussi noires ou pessimistes, et certaines peuvent même nous faire sourire. Je pense par exemple à cet été andalou, qui nous permet de vivre une étape du tour cycliste d’Espagne. Nous serons en compagnie du peloton, avec un de ces champions qui fait rêver, enfin ceux qui aiment le cyclisme, et aussi au cœur de sa famille qui a décidé de se mettre sur le bord de la route pour le voir passer… C’est plein d’humour, peut-être pas très réaliste car on ne parle pas de dopage, et jusqu’à la fin, on se demande bien qui va gagner l’étape…
Je ne peux que vous confirmer que j’ai beaucoup aimé ce premier volume d’ « Un été andalou et autres aubergines ». D’ailleurs je n’aime pas que les courgettes, j’aime aussi les aubergines et au bout de quelques pages, on se dit que c’est encore la saison des aubergines et que l’on pourrait bien en préparer pour le dîner…
Bonne lecture et bon appétit !