Le petit Bonzi
de Sorj Chalandon

critiqué par Cuné, le 31 août 2005
( - 57 ans)


La note:  étoiles
Oubliez.
Lyon, 1964, Jacques Rougeron a 12 ans, et souffre d'être bègue. Armé de sa solide imagination, il nous fait partager son quotidien, l'espace de 7 jours, pendant lesquels il passera d'herboriste amateur à mythomane complet, sous la houlette d'une langue enfantine et poétique.
Le problème c'est qu'on n'y croit pas, que c'est plat, qu'on attend la guerre des boutons et qu'on a une sorte de Jules Vallès comprimé.
De jolis portraits se dessinent pourtant, tel Manu l'instituteur, qui volera au secours de Jacques en se perdant lui-même, mais pour ma part j'ai trouvé ça longuet et convenu, désolée !
Sorj Chalandon, 53 ans, est journaliste à Libération depuis 1974. Il a reçu le prix Albert Londres en 1988 pour ses articles sur le procès Barbie et l'Irlande du Nord. Le petit Bonzi est son premier roman.
enfance, revue et corrigée 10 étoiles

Jacques Rougeron redouble son CM2. Il bégaie et semble la risée de ses camarades. Heureusement, par le truchement de son fidèle Bonzi, qui le suit partout, il peut s'exprimer librement, loin du regard des autres. Tel est son terrible secret. Sur cette trame minimaliste, qui aurait pu faire l'objet d'une nouvelle délicatement ciselée, Sorj Chalandon a bâti un roman, court mais néanmoins d'un ennui profond. Les enfants y sont pourvus d'un langage peu crédible, même pour l'époque (1964). En fait, il s'agit d'un exercice de style, bavard, qui témoigne d'un mépris profond pour l'enfance, ses peurs, sa méconnaissance du monde des adultes, plus que d'une volonté de transcrire par les mots cet état en perpétuel devenir. D'autres ont essayé, avec succès, de se mettre dans la peau d'enfants ("Zazie dans le métro", "Alain et le nègre") ou d'handicapés mentaux ("Des souris et des hommes", "Le bruit et la fureur"), mais jamais n'ont ridiculisé les personnages dont ils tentaient de reproduire pensées et langage. Dommage, car il émane malgré tout une certaine poésie de ce récit digne de "La foire aux cancres".

Jfp - La Selle en Hermoy (Loiret) - 76 ans - 30 avril 2017


Une semaine dans la tête d'un enfant 7 étoiles

Jacques est bègue et ses copains ne lui font aucun cadeau, se moquent de lui et lui rendent la vie impossible. Ses parents, pense l'enfant, ne sont pas beaucoup plus tendres, surtout son père qui le méprise et le bat.

Jacques cherche à sortir de cette situation, d'abord en tentant de guérir son bégaiement puis en essayant de changer le regard qu'ont sur lui ses camarades de classe et de ses parents.

Jacques sera pris au piège de son imagination. Seul son instituteur comprendra ce qui se passe dans cette petite tête et le sauvera.

Jacques n'est pas un enfant sympathique, même pas reconnaissant vis à vis de son maître, inconscient de ce que celui-ci a fait pour lui et des risques qu'il a pris.

Des longueurs oui, et j'ai bien failli moi aussi abandonner ma lecture, mais j'ai beaucoup apprécié l'authenticité de ce portrait d'enfant. L'auteur ne cherche pas à nous apitoyer sur le sort de cet enfant malheureux et battu.
Jacques est un enfant ordinaire plein d'imagination qu'il utilise pour se sortir de cette jungle qu'il ne sait pas interpréter mais qui est son quotidien.

Lurette - - 85 ans - 27 janvier 2016


J’ai failli abandonner… 3 étoiles

Cela aurait pu, cela aurait dû même, être une histoire extrêmement touchante, celle d’un jeune garçon bègue (Jacques) qui pour lutter contre la solitude où l’a relégué son bégaiement, s’invente un ami imaginaire (Bonzi) et décide que l’herbe va soigner son handicap. Malheureusement, j’ai trouvé que le style d’écriture avait bouffé toute l’émotion et le plaisir de lecture. Même l’histoire finit par perdre en crédibilité. Ce style peut convenir le temps d’un paragraphe ou à la limite un chapitre (court), mais le fait de commencer plusieurs phrases d’affilée par le même sujet, suivi d’un verbe et d’un complément, parfois juste d’un verbe, contribue à ralentir grandement la lecture. J’ignore si l’auteur a cherché à reproduire le phrasé d’un enfant bègue, mais ce qui est sûr, c’est que cela donne un rythme beaucoup trop saccadé qui a très vite engendré ma lassitude, voire mon agacement, et j’avoue que si le livre avait été plus long, je l’aurais certainement lâché en route…

J’ai très peu apprécié également cette manière qu’a l’auteur de transformer à tout bout de champ des adjectifs en noms ou de faire des raccourcis sémantiques. Deux extraits pour illustrer cela : « Il déchire aussi un morceau de pain avec la croûte et la mie. Comme chaque soir. Pour après. C’est son repas de plus tard, de tout seul. » (p.164). « Il pleure. Il se glisse dans ses draps. Il n’ose pas chercher le glacé dans les recoins. » (p.166). Certains trouveront ce parler « enfantin » très original voire poétique, mais j’ai aussi eu cette impression que cela pouvait être juste lié à un accès de flemmingite aiguë.

L’exutoire d’un gamin bègue, je veux bien l’admettre. Et on comprend bien que Sorj Chalandon ne visait pas le best-seller. Mais malgré une certaine sincérité du propos, on est ici très proche de l’exercice de style, et il faut reconnaître qu’il y a quelques passages intéressants, mais j’avais trop souvent ce sentiment que l’auteur se regardait écrire, d’’où sans doute le fait que je n’ai ressenti aucune émotion, que ce soit pour les personnages, trop nombreux et assez inconsistants, y compris les principaux (à l’exception de Manu l’instit). Même le scénario est décevant par rapport à la tension qui émerge de l’histoire. Disons que je m’attendais à une fin plus marquante et plus crédible.

En résumé, une déception par rapport à mes attentes !

Blue Boy - Saint-Denis - - ans - 15 décembre 2014


Secrets de l'enfance 7 étoiles

Le roman aurait dû être intitulé le « Le Petit Jacques » car c’est lui le personnage central, un enfant bègue à la personnalité fragile qui exploite multiples stratagèmes pour se protéger des autres et surtout de son père brutal. Bonzi, son meilleur ami, l’épaule dans les épreuves de l’enfance.

L’écriture est réduite à son plus simple usage. Elle est répétitive et pratiquement niaise - Il fait ceci. Il fait cela. Il est ainsi. Il est comme ça. Un artifice qui a pour effet de rendre le rythme saccadé et agaçant. Peut-être un choix délibéré de la part de l’auteur pour imiter le handicap du jeune héros?

Il y a une surprise dans ce roman. On la devine facilement. Mais, malgré les lacunes, c’est charmant et fantaisiste.

Aaro-Benjamin G. - Montréal - 55 ans - 24 mars 2006


un réel bonheur 10 étoiles

Parmi les nombreux ouvrages littéraires parus récemment, un livre a particulièrement retenu mon attention et c'est avec un réel bonheur que j'ai lu "Le Petit Bonzi" de Sorj CHALANDON. J'ai suivi avec un intérêt très vif les quelques jours de la vie du petit Jacques et de son instituteur, tous deux si attachants. Cet instituteur représente pour moi l'idéal de l'enseignant, jusqu'à en devenir le symbole de l'abnégation dans l'exercice de sa profession. Jacques, lui, nous fait partager son univers d'enfant malheureux, avec une grande finesse et une grande pudeur. On voudrait pouvoir le protéger et l'aimer. D'autres personnes gravitent autour d'eux, sans oublier l'irremplaçable Bonzi et leur univers nous ramène tous à nos enfances.
De plus, tout lecteur de ce merveilleux roman n'aura plus jamais le même regard sur les mots de notre langue française: Sorj Chalandon leur a donné la vie.
J'espère que ce livre d'une sensibilité exceptionnelle, retiendra l'attention d'un jury littéraire, son auteur en est digne!

Caz - - 64 ans - 10 septembre 2005


des mots pour les maux 10 étoiles

Le petit Bonzi est un très beau roman. L’écriture est ciselée, concise, sans « gras » autour. Il y a une recherche sur le mot, une langue inventée tout exprès pour permettre à Jacques Rougeron, petit garçon bègue, de faire en sorte que les mots ne soient plus des ennemis mais des amis. Cette langue est magique, belle à lire. On souffre avec Jacques Rougeron, on a l'émotion qui nous reste au fond de la gorge. Avec lui, on découvre un nouveau dictionnaire, et puis des pays imaginaires qu'on aimerait pouvoir visiter. Car il y a cette écriture, donc, et puis une histoire qui nous tient en haleine. Jacques Rougeron rend supportable l'invivable en s'inventant un autre monde, des batailles napoléoniennes, un papa qui disparaît, et même la peste qui frappe l’école. Mais, de petit mensonge en gros mensonge, il risque de se retrouver pris au piège. Une situation que tous les petits menteurs ont connue un jour... Je trouve que "ça marche" très bien. On est très loin de la guerre des boutons et des 400 coups, et heureusement! Pas de fausse nostalgie en noir et blanc mais une douleur brute, réenchantée par la langue.

Medele - - 56 ans - 9 septembre 2005