Quel plaisir de retrouver notre ami Yann Calec dans une aventure qui n’a rien à envier aux précédentes… Mais, après avoir été le second éternel qui remplace les commandants défaillants, on s’attendait, comme Yann lui-même, à voir la compagnie Chargeurs & Affréteurs Réunis lui offrir un commandement à la hauteur de ses légitimes ambitions… Et ce ne sera pas le cas, bien sûr, on est quand même dans une bande dessinée et il faut bien que le scénariste, l’excellent Jean-Charles Kraehn, sème quelques embûches pour éviter à Yann une vie trop monotone… Il partira donc vers l’Asie du Sud-Est, histoire de commander un des deux stationnaires de la compagnie indochinoise, une des filiales de la compagnie française…
Pour Yann ce voyage, cette affectation, cette séparation de son épouse et de sa fille, ce n’est pas simplement le danger de la guerre, c’est aussi le risque de se rapprocher de son passé, de son père, d’évènements qu’il croyait avoir enterré à tout jamais…
Comme toujours le duo Kraehn-Jusseaume nous offre une réalisation de toute beauté, de toute efficacité, car chez eux la bande dessinée ce n’est pas seulement un objet à regarder, à admirer, c’est une histoire racontée potentiellement aux lecteurs… Potentiellement, car le lecteur doit faire l’effort de faire ses bagages et de partir, lui aussi, vers cette Indochine lointaine et mystérieuse… si mystérieuse que Yann aura bien du mal à comprendre ce que chacun y fait…
Mais il voudra, aussi, découvrir ce qu’est devenu ce père lointain et oublié au fond de sa mémoire… et cette quête, cela en est bien une, ne sera pas une simple formalité…
Avec cette bande dessinée, les auteurs nous plongent dans cette Indochine, les jeunes lisez Vietnam, tout simplement, cette Indochine, donc, coloniale, française mais pas toujours francophile. Une terre où chacun, quelle que soit sa couleur, sa race ou sa religion, son employeur ou sa fonction, cherche à tirer son épingle du jeu, à faire fortune ou assurer son avenir… Cette ambiance semble assez glauque pour imaginer ce que va penser ce pauvre Yann qui est l’image incarnée du chevalier pur et dur de toujours, celui qui ne peut que souffrir dans ce monde de l’à peu près, de la compromission…
C’est un nouveau cycle qui commence avec cette Escale dans le passé, mais c’est surtout, pour de très nombreux lecteurs, la confirmation d’une des très grandes séries d’aventures maritimes dans la lignée de ce qu’écrivait Charlier pour le dessinateur Hubinon dans Barbe-Rouge… Aventures en tout genre, amours, dureté de la nature et des hommes et… honnêteté et intégrité fondamentales et permanentes du héros !!!
C’est excellent et c’est à lire !!!