Mirages d'Egypte : Les murailles d'Alexandrie
de Daniel Vaxelaire

critiqué par Bachy, le 20 octobre 2005
( - 61 ans)


La note:  étoiles
Histoire méconnue
Toulon…1798… Le jeune général Bonaparte, qui venait de s’illustrer en Italie, embarqua sur l’Orient dans l’immense chambre arrière du bateau décorée de tapis et de tentures. La France avait décapité son roi, mais elle s’était donnée un nabab. La flotte se traîna vers le sud sous un soleil de feu. C’était comme un grand fleuve de bateaux qui coulait entre Corse et Italie. L’escadre de Marseille avait grossi celle de Toulon et quelques dizaines de navires encore étaient arrivés de Gênes et d’Ajaccio. Les soldats, enfin amarinés, observaient, quand leurs chiens de garde les laissaient monter sur le pont, ce spectacle écrasant : une armée marine glissant vers l’inconnu. Le but ne fut dévoilé qu’en chemin : la conquête de l’Egypte…via Malte qui tomba sans coup férir. Des personnages issus de milieux divers embarquèrent pour le meilleur et pour le pire. Alexandrie devint française le 2 juillet 1798. Dès que le drapeau tricolore monta au phare, les navires de transport hissèrent les voiles vers le port, au soulagement général de ceux qui les occupaient. L’interminable traversée était finie. Enfin, du sol ferme sous les pieds. Enfin, de solides canons pour se protéger des Anglais. ..
Daniel Vaxelaire a embarqué son érudition dans ce roman. C’est pour lui l’occasion d’écrire à la fois l’épopée et son revers. Il nous fait partager le point de vue des sans-grade, ces oubliés de l’Histoire. Ce chercheur passionné place ses travaux dans le sillage d'une école qui n'a pas peur des chemins de traverse et des approches transversales. Faisant éclater avec intelligence les repères quand il décloisonne les disciplines, l’auteur a reconstitué l'odyssée bonapartiste en retrouvant les lieux, obstiné à faire parler les documents. Son livre aux subtiles résonances littéraires d’anciens vocables français, est à la fois une méthode de l'histoire et une histoire de la méthode. Un récit anecdotique, une ardeur serrée, une écriture, une exigence d'intensité, tel apparaît ce roman, le récit d'hommes embarqués dans un temps d'aventure, et qui gardent leur simplicité révolutionnaire. L’auteur connaît bien le climat de l’époque, profondément irrationnel. Histoire événementielle et Histoire n’ont pas de secret pour lui. Le Bonaparte de Vaxelaire s’entend à soigner sa publicité : « ce que je me veux être ». Vaxelaire s’est beaucoup impliqué dans cette épopée. Une fois qu’il a pris dans cette matière, ses personnages lui permettent de raconter le général à travers un regard romanesque. Il faut reconnaître qu’il n’est pas aisé d’insérer dans une histoire toutes les anecdotes découvertes en la préparant. Il a parfaitement réussi. En un sens, il est devenu un voyeur agréable à lire !