Chaleur du sang de Irène Némirovsky
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Superbe !
Ce livre est le dernier en date des œuvres découvertes dans les documents d’Irène Némirovsky.
Il est particulièrement heureux que ce livre ait été retrouvé, car je le trouve vraiment magistral ! A la fois c’est très triste, pour elle d’abord, mais aussi pour nous qui n’aurons plus la chance de lire d’autres livres d’elle.
Toute cette histoire se passe à la campagne du côté de la Bourgogne. Il est même fort- probable que le village décrit ici soit celui où l’auteur se réfugia au début de la guerre avec ses filles.
Le récit est fait par un homme d’un certain âge, Sylvestre ou Sylvio, ruiné par la chaleur du sang qui le brûla dans ses jeunes années. Dans le même village vivent Hélène et François, couple du même âge, qui ont une fille répondant au nom de Colette. Hélène et François mènent une vie de couple modèle. Personne n’imagine l’un sans l’autre, ils semblent profiter de chaque moment qui passe pour savourer les charmes et la stabilité que leur donne leur amour profond. Ils rêvent de la même vie pour leur fille qui va, tout prochainement, épouser un brave garçon du nom de Jean Dorin. Chaque futur marié ne sera pas sans biens… Et puis il y a une certaine Brigitte que l’on nous présente comme la fille adoptive de la demi-sœur d’Hélène. Une jeune et belle pouliche à la chaleur du sang bien vivante. Mariée à un vieillard très riche, elle le sera bientôt et prépare déjà son futur avec l’homme qu’elle aime, son amant Jean Ohnet.
Voilà les personnages principaux en place…
Sylvestre va nous raconter toute cette histoire avec ce calme, cette distance d’avec les choses, parfois une certaine froideur, qu’il a acquis avec l’âge. Pour lui, la chaleur du sang n’est plus à l’ordre du jour. Mais… L’a-t-elle jamais été pour Hélène et François ? Et Colette et Jean ?... Pas de doutes par contre pour Brigitte !
Irène Némirovsky nous offre ici un livre merveilleusement bien écrit. Son style est simple mais très précis. Quel art de raconter tout cela aussi finement mais simplement ! Cela m’a fait penser à Maupassant. La campagne, oui, mais aussi l’art de l’écriture, de la concision. Némirowsky jongle avec la notion du temps qui passe inéluctablement et pour nous tous. Impossible de ne pas se sentir concerné et d’approfondir la question avec elle. N’oublions pas le sujet : « Chaleur du sang »…
Les descriptions du monde paysan valent aussi celles de Maupassant. Bref, j’ai lu ce livre avec un énorme plaisir !
Message de la modération : Prix CL 2010 catégorie Roman de la Francophonie
Les éditions
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Chaleur du sang [Texte imprimé], roman Irène Némirovsky texte établi et préfacé par Olivier Philipponnat et Patrick Lienhardt
de Némirovsky, Irène Philipponnat, Olivier (Editeur scientifique) Lienhardt, Patrick (Editeur scientifique)
Denoël / ROMANS FRANCAIS
ISBN : 9782207259511 ; 1,93 € ; 01/03/2007 ; 155 p. ; Broché -
Chaleur du sang [Texte imprimé] Irène Némirovsky texte établi et préfacé par Olivier Philipponnat et Patrick Lienhardt
de Némirovsky, Irène Philipponnat, Olivier (Editeur scientifique) Lienhardt, Patrick (Editeur scientifique)
Gallimard / Collection Folio
ISBN : 9782070347810 ; 6,30 € ; 17/04/2008 ; 195 p. ; Broché
Les livres liés
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Les critiques éclairs (19)
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Le classicisme et le talent
Critique de Vinmont (, Inscrit le 12 août 2014, 50 ans) - 12 janvier 2020
cette chaleur du sang est écrit dans un style certes classique mais vraiment beau.
L'auteur nous relate différentes histoires pour construire et nous offrir une œuvre de très bonne facture.
Ces moments magiques.
Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 17 février 2016
Lire Irène Némirovsky a quelque chose de douloureux. Cette jeune femme qui fut livrée par la gendarmerie française à l'envahisseur en 1942 et mourut à Auschwitz.
Cette oeuvre a été reconstituée d'après des notes de l'auteur.
Chez les "taiseux"...
Critique de Nathafi (SAINT-SOUPLET, Inscrite le 20 avril 2011, 57 ans) - 1 juin 2014
"Chaleur du sang" nous parle des "taiseux", ces paysans que l'auteure donne l'impression de si peu connaître dans d'autres de ses ouvrages. Ayant vécu ses derniers mois à Issy l'Evêque, en Bourgogne, elle a côtoyé de près ces gens et s'en est beaucoup inspirée pour écrire cet ouvrage.
On découvre donc Sylvestre, un homme d'un certain âge, blasé, se perdant dans sa solitude, se pliant parfois aux invitations de la famille, qui regarde autour de lui tout ce petit monde évoluer... Hélène, la veuve d'un de ses cousins, remariée depuis plus de vingt ans, tient à garder avec lui un lien et le considère pleinement de la famille. C'est ainsi qu'il est invité aux noces de sa fille Colette, qui épouse Jean.
La vie des gens, tout simplement, mais derrière ces descriptions se profile une intrigue, se révèlent des secrets, se dévoilent les passions. Les passions, justement, la "chaleur du sang", tout aussi vives qu'ailleurs dans ce monde refermé sur lui-même, qu'on ne soupçonnerait pas au premier abord, mais qui peuvent se révéler dévastatrices.
Encore une fois Irène Némirovsky nous entraîne au plus profond des êtres, dans ce qu'ils ont de meilleur ou de pire.
décevant
Critique de Yotoga (, Inscrite le 14 mai 2012, - ans) - 22 mai 2012
L'histoire se résume à "qui couche avec qui", qui est la femme et qui la maitresse, qui est le mari qui l'amant , dans un village où les habitants semblent n'entendre rien et ne rien savoir.
Il n' y a rien à critiquer au style d’écriture. Une citation (magnifique) :
"Il y a dans une assemblée de gens mûrs quelque chose d'imperturbable ; on devine des organismes qui ont digéré tous les plats lourds, amers, épicés de la vie, qui ont éliminé tous les poisons, qui sont pour dix ou quinze ans dans un état d'équilibre parfait, de santé morale enviable. Ils sont satisfaits d'eux-mêmes. Ce pénible et vain travail de la jeunesse par lequel elle essaie d'adapter le monde à ses désirs a déjà été accompli par eux. Ils ont échoué et maintenant, ils se reposent."
L'auteure s'attaque cette fois à la société des campagnes alors que beaucoup de ses oeuvres se situent normalement dans la haute, voire la bourgeoisie, et il me semble qu'elle reporte ses critiques de la société sur cette population : l'enfermement des habitants contre les "étrangers", ceux qui viennent de l’extérieur, "les adoptés"...On y trouve des problèmes d'alcoolisme, de faillite personnelle.
Et puis, vers 3/4 du livre, ça bascule...
J'apprécie le dialogue observateur de Sylvio, mais j'ai trouvé la fin assez lourde, la chute qu'on ressent déjà arriver 25 pages plus haut.
Du coup, déception ...
Forme exaltante...
Critique de FranBlan (Montréal, Québec, Inscrite le 28 août 2004, 82 ans) - 25 avril 2012
Une sorte d’empreinte d’ADN unique qui caractérise certains auteurs; dès les premiers mots, peu importe ce qu’ils ont à dire, une émotion exaltante que je reconnais entre toutes m’étreint et c’est sans aucun effort que je me retrouve en parfait état de symbiose avec l’auteur de cette forme exaltante!
Voilà un des grands bonheurs que la lecture me prodigue…
Et c’est avec un grand bonheur que je lis pour la première fois cette auteure, grâce au Palmarès des prix des lecteurs de CL, celui de 2010;
j’ai lu ce court roman dans un seul souffle; somme toute un scénario assez banal, une variation de clichés d’adultères sur fond champêtre au charme frugal…, raconté dans une forme unique qui transcende le sujet.
Sans aucun doute que je lirai d’autres ouvrages de l’œuvre de cette formidable auteure.
suis-je trop jeune?
Critique de L'aventure (, Inscrit le 6 juillet 2007, 52 ans) - 11 février 2011
Je reste perplexe.
A la réflexion je n'ai sûrement pas suffisamment de vécu pour le comprendre pleinement.
Je le range dans la bibliothèque et le reprendrai dans ...10ans?
Feuilleton de luxe
Critique de Aaro-Benjamin G. (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 55 ans) - 16 septembre 2010
Les amours coupables
Critique de Dirlandaise (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 69 ans) - 27 juillet 2010
Un roman sentimental dans le plus pur sens du terme, jamais mièvre mais d’une rare sensibilité et d’une étonnante pudeur. Pour s’aimer vraiment, il faut se cacher et le véritable amour est sujet à de multiples obstacles parfois insurmontables, c’est ce qui en fait toute la richesse et la valeur. Le passage du temps dilue les passions mais ne les efface jamais de la mémoire. Parfois, ce sont de très brèves périodes de vie mais qui marquent à jamais ceux qui en sont les acteurs.
Je ne peux m’empêcher de penser à « Une vie » pour l’atmosphère et le destin des protagonistes. Car, comme dans le roman de Maupassant, il y règne un climat pesant empreint d’une désespérante lourdeur où la vie est question de conventions plus que de véritables sentiments et lorsque ces véritables sentiments prennent le dessus, c’est le drame qui surgit inévitablement.
C’est le genre de lecture qui me touche énormément et qui me laisse une agréable impression de douceur. L’amour humain est vraiment la plus belle chose qui existe en ce monde et le passage du temps n’y change rien. Ah c’est beau !
Passée pas mal à côté
Critique de Sahkti (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans) - 25 juillet 2010
Certes, c'est bien écrit mais quelque chose m'empêche de plonger totalement dans le récit cette fois, sans que j'arrive à préciser exactement ce dont il s'agit.
J'apprécie les détails dont l'auteur parsème son récit, l'humanité dont elle colore ses personnages... oui, tout cela est bon, mais pas suffisant pour me séduire, désolée.
Sans doute est-ce dû à ces leçons de vie qui s'égrènent au fil du temps, à ce regard sur l'amour et la vie... autant de notions avec lesquelles ne ne suis pas toujours d'accord.
Cela ne m'empêche cependant de trouver beaucoup de charme et de qualités à la plume de l'auteur, soignée, maîtrisée et élégante. Et il est vrai que rien que pour cela, déjà, le roman vaut la peine d'être lu. Après, pour ce qui est de la trame, c'est une question de goûts...
Lourds secrets
Critique de Koudoux (SART, Inscrite le 3 septembre 2009, 60 ans) - 5 juin 2010
Le début n'a pas été facile mais après on se laisse emporter par la narration de Silvio, les lourds secrets du passé vont resurgir...
Je préfère lire un autre livre avant de me faire une opinion sur l'auteure.
Feu qui brûle...
Critique de Shan_Ze (Lyon, Inscrite le 23 juillet 2004, 41 ans) - 3 juin 2010
Ça commence doucement, on découvre les personnages, le narrateur surnommé Silvio, François et Hélène et leur fille Colette… Silvio nous raconte leur histoire, restant en retrait : les amours interdites, les morts et les rumeurs qui vont bon train.
Tout se conclut un peu rapidement, on est déjà au dénouement (et quel dénouement !). Et on réfléchit, alors c’est ça cette chaleur de sang qui bouillonne dans les veines des jeunes du pays. Est-ce de l’amour ? De la passion ? Je ne sais pas, je me sens un peu embrouillée par cette fin qui me semble un peu précipitée, mais c’est sans doute le but ?
Dans un coin de ma tête, je me demande si Irène Némirovsky n’aurait pas modifié ses brouillons, conclu plus en douceur si elle avait pu ? En tout cas, je la relirai, j’ai bien aimé son écriture, je lirai d’autres ouvrages d’elle, le fameux Suite française (Prix Renaudot, 2004) m’intéresse…
"La vie profonde et secrète des petits pays paisibles"
Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 66 ans) - 16 mai 2010
On retrouve dans ses romans, une telle connaissance de la nature humaine, une telle justesse de ton, une telle finesse d'observation qu'on se sent immédiatement très proche de ses personnages.
Comment imaginer que ce roman (qu'elle pensait intituler "Jeunes et vieux"), a été écrit en 1937 quand on lit "je me demandais (les jeunes) quel plaisir ils pouvaient trouver à se trémousser en cadence. ... Ils (les vieux) se reposent... de quarante à soixante ans, ils jouissent d'une paix précaire."
Ou encore, ces phrases si fortes:
"Cécile Coudray, qui a sauvé l'honneur d'Hélène et peut-être sa vie, quand elle la croyait aux abois, n'a jamais pu lui pardonner son bonheur. C'est humain."
Un grand merci aussi aux découvreurs de ce roman que le mari de l'auteur n'avait pas eu le temps ou le courage de finir de taper le texte.
« Pas seulement le bonheur des sens … »
Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans) - 28 mars 2010
Hélène et François racontent leur rencontre, leur mariage et tous les avatars qui ont conduit à leur union à la demande de leur fille, Colette, qui va se marier prochainement avec un jeune homme du pays qu’elle croit aimer mais son cœur brûlera vite pour un autre, comme celui de son amie Brigitte mariée avec un vieillard cacochyme. Silvio, regarde, se souvient et raconte l’histoire de cette famille qui est celle de bien des familles de la région et de nombreuses autres campagnes françaises. J’ai eu l’impression tout au long de cette lecture, de me retrouver sur les plateaux jurassiens quand j’étais môme, dans les années cinquante et soixante encore. Dans ces campagnes où l’on marie les filles avec un homme qui a du bien, où l’avoir compte beaucoup plus que l’être, où l’on n’échappe pas à son destin : le riche épouse la riche, ou la belle, et la pauvre, ou la moins belle, n’épousera qu’un pauvre peut-être même pas beau du tout. Brigitte et Colette, jeunes femmes belles et bouillonnantes, telle Constance Chatterley égarée sur les rives de la « Mare au diable », ne se contenteront pas de ces mariages arrangés et revendiqueront les droits de leur corps et de leur cœur mais devront, aussi, en payer le prix fort.
Un excellent roman écrit dans un style sobre et dépouillé qui n’a pas besoin de beaucoup de mots tant ceux qui sont utilisés sont justes et opportuns ; et tant le regard porté par l’auteur est précis et profond. On dirait qu’Irène a des générations de Morvandiaux dans son arbre généalogique, elle comprend ces paysans matois, rusés qui s’épient, se jaugent, sont en permanence à l’affût d’un bon parti ou d’une bonne affaire, comme si elle, aussi, avait été mariée avec l’un d’eux. Une certaine forme d’apologie de cette vie simple dans cette campagne pas encore altérée ; mais une apologie consciente des limites de cette société qui tolère mal les étrangers et ceux qui se sont mis en marge des règles de ce milieu.
Dans ce roman, Irène Némirovsky propose une belle analyse du couple épouse-maîtresse, des aspirations du cœur et du sexe, de la chair et des sentiments, de la passion et de la raison, pour défendre le sort de ces femmes qui ne sont pas que des monnaies d’échange mais aussi des êtres qui ont d’autres exigences et qu’ « il ne s’agit pas seulement des exigences de la chair. Non, ce n’est pas si simple. La chair, elle, se satisfait à bon compte. Mais c’est le cœur qui est insatiable, le cœur qui a besoin d’aimer, de désespérer, de brûler de n’importe quel feu… ». Elle explore aussi la notion de vérité qui n’est pas forcément toujours bonne à dire, un bon mensonge consensuel vaut parfois bien une cruelle vérité, de faute qui n’est pas pardonnée facilement et de punition qui est souvent bien sévère dans ces campagnes puritaines.
Une grande voix, une très belle plume, au service de la cause des femmes et de l’amour « … quelles belles folies que celles de l’amour ! Sans compter qu’on les paie à l’ordinaire si cher qu’il ne faut pas les mesurer parcimonieusement à soi-même ni aux autres. »
Lecture envoûtante
Critique de Saumar (Montréal, Inscrite le 15 août 2009, 91 ans) - 26 mars 2010
Silvio s’installe, à demeure, non loin de ses cousins François et Hélène et de leur fille Colette, sur le point de se marier avec Jean Doret. Ces derniers habiteront la grande maison du Moulin-Neuf héritée des parents de Jean. Tout ce monde, vit aisément et heureux dans ce patelin tranquille, où les secrets et les non-dits ne se dévoilent pas ouvertement, jusqu’à ce que la noyade de Jean vienne en briser la quiétude. Moulin-Neuf est voisin de Coudray où habitait jadis Cécile, la demi-sœur d’Hélène, en mourant, elle laisse Coudray à une enfant recueillie, du nom de Brigitte. En pleine ardeur de jeunesse, celle-ci fait un mariage d’intérêt avec Declos, un riche et vieux paysan de 60 ans.
Ce jour-là, plusieurs personnes étaient venues au Maluret pour battre le blé. François entend dire d’un jeune garçon, qu’il a vu quelqu’un pousser monsieur Jean dans l’eau. Deux hommes se battaient et monsieur Jean a crié en tombant. François veut avertir la justice. C’est un crime, il faut bien porter plainte. Colette, sa fille, pleure la mort de son mari, À cet instant, elle seule connaît le secret coupable.
Ce qui caractérise l’écriture de l’auteure dans ce roman, ce sont les descriptions vivantes des événements et des sentiments des personnages. Elle a réussi à créer un narrateur bien sympathique qui aplanit les difficultés de communication entre les générations. L’intrigue adultère avec ses rebondissements m’a captivée, et la chute imprévisible de l’histoire m’a renversée. C’est une écrivaine de grand talent. Elle utilise des mots simples, mais efficaces. Pour toutes ces raisons, j’en recommande la lecture.
Toujours le même plaisir
Critique de Saule (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 59 ans) - 19 février 2010
L'histoire se passe dans un petit village de Bourgogne, à l'âme "profonde et secrète". C'est étonnant qu'une jeune femme comme elle l'était lorsqu'elle a écrit ce livre (la trentaine ?) puisse si bien dépeindre l'âme un peu frustre des paysans : des gens avares, qui enfouissent les rancœurs et les passions dans un monde de non-dit et de secrets. Elle parle remarquablement aussi des différents âges de la vie : on a l'impression que cette femme avait tout vécu tant elle raconte avec talent la vieillesse, les passions de la jeunesse qu'on paye toute sa vie mais qu'il ne faut pas regretter. Voici quelques lignes de son écriture que Nance caractérise justement de "racée" :
"Je jouis de choses simples qui sont à ma portée : un bon repas, un bon vin, ce carnet où je me procure, en y griffonnant, une joie sarcastique et secrète ; par-dessus tout la divine solitude. Que me faut-il de plus ? Mais, à vingt ans, comme je brulais !... Comment s'allume en nous ce feu ? Il dévore tout, en quelques mois, en quelques années, en quelques heures, parfois, puis s'éteint. Après vous pouvez dénombrer ses ravages."
La beauté de la simplicité
Critique de Ngc111 (, Inscrit le 9 mai 2008, 38 ans) - 11 février 2010
A priori rien de singulier, rien de "tranchant" mais l'on se délecte de toute ces phrases qui font mouches, de ces personnages et de cette ambiance qui font un tantinet penser à ceux d'un roman russe, et de ces révélations limpides.
C'est tout simplement un livre où l'on ne bute sur aucune phrase, où l'on n'est pas obligé de relire une énième fois une sentence interminable et bizarrement tournée. L'auteur a trouvé un style collant parfaitement au récit.
A peine regrette-t-on la brièveté de l'ensemble et les renversements de situation pas très surprenants.
Cela mérite en tous cas un coup de chapeau et un petit extrait pour illustrer la beauté de la simplicité:
"[...] Je boirai un verre. Je ne penserai à rien. Je me coucherai. Je ne dormirai pas beaucoup. Je rêverai tout éveillé. Je reverrai des choses et des gens d'autrefois. Toi, tu vas rentrer, tu vas te désespérer, tu vas pleurer, tu vas demander pardon à la photo du pauvre Jean, regretter le passé, trembler pour l'avenir. Je ne sais qui de toi ou moi aura la meilleure nuit."
Une écriture raffinée
Critique de Nance (, Inscrite le 4 octobre 2007, - ans) - 17 janvier 2010
Roman posthume.
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 2 janvier 2010
Evoquer Maupassant n’est pas usurpé. Comme lui, elle nous plonge dans les méandres sentimentaux de personnages ordinaires de la campagne française. Comme avec lui, on se surprend à rentrer dans la peau de François, d’Hélène, de Colette, … , de vivre dans cette campagne du centre de la France. Doux quotidien mais terrible quotidien en même temps.
« Hier,1er mars, par un jour de soleil et de grand vent, je suis parti de bonne heure de chez moi pour aller toucher de l’argent à Coudray. Le père Declos me doit huit mille francs sur la vente de mon pré. Je m’attardai au bourg où on m’offrit une bouteille. Quand j’arrivai à Coudray, c’était le crépuscule. Je traversai un petit bois. De la route on voyait ses jeunes et tendres arbres verts qui séparent Coudray du Moulin-Neuf. Le soleil se couchait. Quand j’entrai sous-bois, l’ombre des branches faisait déjà la nuit sur la terre. J’aime nos bois silencieux. On n’y rencontre pas une âme à l’ordinaire. Je fus surpris en entendant tout près de moi une voix de femme qui appelait. »
Des descriptions à foison, une écriture simple et directe, une grande précision. C’est un vrai bonheur à lire. Mais il ne s’agit pas que d’une simple relation d’évènements humains. Il y a de l’investigation dans ce roman là. Dans la peau de Silvio, devenu vieux, on réexamine des évènements qu’il a eu à connaître mais dont la partie apparente ne permettait pas de comprendre la cohérence. Des recoupements, des discussions, une volonté d’éclaircir les choses et ce sont des rebondissements d’une grande originalité qu’Irène Némirovsky nous met sous les yeux. Encore et toujours l’amour - le moteur de l’humain - l’amour, les passions soudaines et dévorantes, les actes qu’ils engendrent et qui sortent parfois du cours normal des choses … François aime Hélène, Hélène devenue veuve épouse François, Colette leur fille va épouser Jean Dorin mais Marc va passer par là. Et puis Brigitte, fiancée à Marc, … De l’humain, du sentiment à plein régime … juste une fin un peu rapide.
toujours aussi exceptionnel
Critique de Dudule (Orléans, Inscrite le 11 mars 2005, - ans) - 22 février 2008
Vit aussi dans ce village un couple exemplaire François et Hélène, leur fille aînée Colette va épouser Jean Dorin, tout est réuni pour laisser présager qu’ils vont mener la même vie aimante, heureuse des parents.
Le récit va révéler par petites touches, et avec une intensité croissante le dénouement final.
Irène Némirovski a un style d’une force, d’une analyse, qui m’émerveille au fur et à mesure de mes lectures.
Il faut vraiment découvrir ou redécouvrir cet auteur exceptionnel, chaque roman est un grand moment de lecture.
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Némirovsky | 3 | Saule | 16 juin 2007 @ 14:02 |