C'était notre terre de Mathieu Belezi
Catégorie(s) : Littérature => Romans historiques
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Roman choral
Une longue lignée de colons, les de Saint-André a transformé une étendue de sable et de caillasses stériles du Dahra algérien en une vaste et opulente propriété de centaines d'hectares où poussent le blé, l'orge, la vigne, les orangers et les citronniers. Les descendants de Jules, le colon fondateur, vivent sans souci d'argent mais avec de nombreux problèmes familiaux : la mère, Hortense, est l'épouse bafouée d'un certain Ernest, ex-petit blanc de Bab El Oued, qui passe ses journées à boire du whisky et ses nuits dans les bras de prostituées. Elle a eu trois enfants, Antoine qui ne veut pas reprendre le domaine et déteste sa condition, Claudia qui a fait un mariage raté et Marie-Claire qui souffre de ses penchants homosexuels et finira au couvent. De plus, l'époque est difficile, le règne des pieds-noirs n'en a plus pour bien longtemps, la guerre d'Algérie arrive avec son cortège d'horreurs. La famille de Saint-André échappera-t-elle à la tourmente ? La propriété redeviendra-t-elle un désert ?
Plus qu'un roman historique, « C'était notre terre » est surtout un roman familial, la saga d'une famille attachante, broyée par les meules impitoyables de l'Histoire. Le style de Belezi est très particulier et demande quelques efforts au lecteur. En effet, il ne s'embarrasse d'aucun détail descriptif ou circonstanciel, proscrit le point et privilégie le témoignage alterné de chacun des six personnages majeurs du drame sans se soucier non plus d'ordre ou de chronologie. Tous les récits étant à la première personne du singulier et apparemment sans autre logique que l'afflux des souvenirs du locuteur, le lecteur se retrouve face à une sorte de récit « choral », un peu incantatoire (avec redîtes des points importants) proche du registre du théâtre antique. La phase d'adaptation passée, on peut apprécier ce texte magnifique, plein de sensibilité, d'honnêteté (rare sur un tel sujet, la bassesse et l'horreur étant équitablement répartie entre les deux camps) et d'humanité. On ne ressort pas indemne de la lecture de ce long pavé (475 pages) qui illustre parfaitement le drame de la colonisation en général, « fardeau de l'homme blanc » (Kipling dixit) et celui de l'Algérie en particulier.
Les éditions
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C'était notre terre [Texte imprimé], roman Mathieu Belezi
de Belezi, Mathieu
Albin Michel
ISBN : 9782226186690 ; 22,30 € ; 20/08/2008 ; 474 p. ; Broché
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L'ALGERIE COLONIALE REVISITEE
Critique de TRIEB (BOULOGNE-BILLANCOURT, Inscrit le 18 avril 2012, 73 ans) - 23 avril 2012
Ernest Jacquemain est le propriétaire du domaine de Montaigne. Homme cruel, infidèle, volontiers violent avec ses domestiques, d’un autoritarisme implacable, il règne en patriarche.
Hortense Jacquemain, son épouse, tout aussi imbue de sa supériorité prétendue d’européenne, adhère tout comme son époux aux valeurs du système colonial : brutalité, culte de l’autorité, de la violence comme argumentaire permanent, est en proie aux tentations de toute nature ; elle succombe elle aussi à l’adultère.
Les enfants de ce couple, Antoine, Claudia, Marie-Claire, tenteront d’échapper, chacun à leur manière, à cet héritage oppressant .Marie-Claire, pour échapper à une homosexualité jamais révélée au cercle familial, entre dans un couvent en Bretagne. Claudia se marie et Antoine connaîtra un destin cruel : après avoir aidé le FLN, il est exécuté au cours d’une corvée de bois, mais la cause réelle de sa mort restera dissimulée à sa famille.
Les personnages dialoguent par des apostrophes, justifications de leurs conduites et exposés de leurs souffrances issues de l’abandon final de cette terre d’Algérie. Toute la violence de l’histoire est contenue dans ces dialogues. Sans outrance, sans pathos , Mathieu Belezi nous fait pénétrer dans les ressorts de cette histoire tragique dont il rappelle une composante essentielle : le recours quasi-permanent à la violence, confinant à la démence : « Il y avait bien assez d’hommes torturés, égorgés, coupés en tranches, bien assez de femmes violées et éventrées, bien assez pour moi, mais pas pour tout le monde puisque le Algériens en venaient à s’en prendre aux Algériens et les Français aux Français étaient-ils devenus fous ? »
Est-ce une restitution d’une conception du monde ? Est-ce une autopsie de l’Algérie coloniale ? La réponse n’est pas certaine à l’issue de la lecture de ce roman incantatoire, qui nous transporte vers ce passé colonial revisité par ces voix douloureuses.
Les douleurs des deux camps
Critique de Kikounette (Nîmes, Inscrite le 15 mai 2003, 52 ans) - 5 novembre 2011
Un roman bouleversant
Critique de Kaftoli (Laval, Inscrit le 29 mai 2010, 59 ans) - 19 février 2011
Un livre à lire: vraiment :)
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