Underworld USA de James Ellroy
( Blood's a rover)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone , Littérature => Policiers et thrillers
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Plongée dans l'Amérique souterraine
Une attente de neuf ans. C’est ce qu’il aura fallu avant que James Ellroy ne livre le dernier acte de sa trilogie américaine, Underworld USA, qui est aussi le titre de ce roman. Il s’agit sans doute du grand œuvre de cet écrivain, expert en polar : raconter les Etats-Unis sur une douzaine d’années s’étalant de l’ère Kennedy au Watergate. De l’époque où, selon lui, le pays perd son innocence, l’assassinat de JFK, à la présidence de Richard Nixon. « American Death Trip », le deuxième volet s’achevait sur les assassinats successifs de Martin Luther King et de Robert Kennedy. Ellroy reprend deux de ses héros là où il les avait laissés. On retrouve ainsi Wayne Tedrow Jr, homme de main de Howard Hugues, auteur d’un parricide et aux accointances mafieuses. Il y a aussi Dwight Holly, le bras armé de John Edgar Hoover, le patron tout puissant du FBI, qui tire les ficelles du pays dans l’ombre. Un nouveau personnage fait son apparition. Il s’agit du jeune Crutchfield, un jeune mateur, expert en filatures, surnommé Trouduc.
Autour d’eux gravitent encore des personnages noir de noir, tels le guérillero Jean-Philippe Mesplède, anti-castriste convaincu réfugié en République Dominicaine, ou un certain Scott Bennett, membre de la brigade de répression des vols de Los Angeles, affublé d’un nœud papillon où est brodé le nombre de malfrats qu’il a abattus. Deux femmes mystérieuses joueront aussi un grand rôle.
Ces sans grade agissent tous en interaction avec des protagonistes qui eux aussi ont participé à la grande Histoire : il y a bien sûr Hoover, le véritable héros de cette saga qui en traverse les trois tomes du début à la fin avec ses mises sur écoute téléphonique, ses plans machiavéliques. L’homme de l’ombre. Il y a Richard Nixon, ce premier tome commence avec les conventions qui ont mené à sa première élection présidentielle. On retrouve encore Howard Hugues, loin ici de l’image mythifiée du cinéma. Il est dépeint comme quelqu’un de profondément raciste, paranoïaque. On le surnomme Dracula, car adepte des transfusions sanguines.
« Nous sommes obnubilés par nos propres vies, au point de les confondre avec l’Histoire ». Cette phrase, qu’Ellroy fait tenir à l’un de ses héros pourrait bien résumer toute la démarche de l’auteur au travers de sa trilogie. Mélanger personnages fictifs et réels pour reconstituer ce qu’aurait bien pu être l’histoire. Les personnages fictifs sont tellement bien campés qu’ils apparaissent des plus crédibles face à la grande Histoire qui avance.
Et l’Histoire, en effet, elle avance. Ellroy commence son roman par un préambule, un braquage sanglant de fourgon blindé, en plein Los Angeles, contenant émeraudes et billets de banque. Ce braquage servira un peu de fil rouge tout au long de cet épais roman. Tous les personnages étant liés d’une manière ou d’une autre par ces faits qui se sont déroulés en 64, soit bien avant les faits relatés dans le présent roman.
Ensuite, on retrouve les Mafieux qui veulent ressusciter l’ancien Eldorado qu’était Cuba, avec les casinos aux mains de la Mafia. Leur but : réimplanter « Little Havana» en République dominicaine avec le consentement de Richard Nixon. Aux Etats-Unis, Hoover voit d’un mauvais œil le fait que la population noire commence à se faire entendre. Il demande donc à son bras droit Dwight Holly de provoquer « en stoemeling » des émeutes entre bandes rivales à Los Angeles afin de discréditer le mouvement. On assiste progressivement à la chute de John Edgar Hoover…
Bref, c’est un roman touffu, impossible à lâcher, même si Ellroy ne s’encombre d’aucune fioriture stylistique. On passe d’un point de vue à l’autre. Comme dans les deux tomes précédents, ces points de vue sont entrecoupés de lectures de documents tirés d’écoutes téléphoniques ou de journaux intimes des protagonistes. Cela rend l’ensemble encore plus vivant.
La trilogie est donc bouclée avec succès, même si ce dernier tome repose sur des événements historiques bien moins influents que dans les deux premiers.
Les éditions
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Underworld USA [Texte imprimé] James Ellroy traduit de l'anglais (États-Unis) par Jean-Paul Gratias
de Ellroy, James Gratias, Jean-Paul (Traducteur)
Payot & Rivages / Rivages-thriller.
ISBN : 9782743620370 ; 24,90 € ; 06/01/2010 ; 840 p. ; Broché -
Underworld USA
de Ellroy, James
Payot & Rivages / Rivages Noir0784-7786
ISBN : 9782743622732 ; 10,65 € ; 05/10/2011 ; 922 p. ; Poche
Les livres liés
- American Tabloid
- American death trip
- Underworld USA
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Underworld USA - 3
Critique de Bookivore (MENUCOURT, Inscrit le 25 juin 2006, 42 ans) - 22 juin 2023
L'Amérique désenchantée
Critique de Kabuto (Craponne, Inscrit le 10 août 2010, 64 ans) - 5 mars 2012
L’histoire est brillante, intéressante mais complexe et ce n’est pas ce que je retiendrais en premier. L’attrait essentiel réside dans les protagonistes de cette chronique. Dwight, Wayne, Marsh, Crutch, Karen et Joan sont à la fois totalement immoraux et fourbes et pourtant si charismatiques qu’on ne peut que les trouver captivants et s’intéresser à leurs destins chaotiques. C’est surtout eux qui m’ont fait aimer ce roman. Ajoutez à cela un style percutant et direct qui fait merveille dans ce contexte malsain et vous comprendrez que vous avez entre les mains un pur chef d’œuvre qu’il faut quand même apprivoiser avant de l’apprécier à sa juste valeur.
N’ayant pas lu les deux premiers volumes de cette trilogie, il me faut de toute urgence réparer cette lacune en espérant avoir autant de plaisir qu’avec celui là.
Le conte d'une réalité vraie
Critique de Monde Vrai (Long Beach, Inscrit le 6 décembre 2011, - ans) - 2 janvier 2012
Dés lors, s'il est exact qu'on est, forcément, plus sévère avec un auteur dont on apprécie le style et dont on connaît par ailleurs le garnd réalisme tout comme la chair de ses oeuvres, je dois bien avouer d'autant plus que je serais bien le dernier à critiquer un rare livre qui se moque du puritanisme et de son ridicule infini sans forcément le nourrir ! Il s'agit là d'un merveilleux bouquin (et sans parler de son hold-up de base et des émeraudes.) L'Amérique.
De la politique au polar
Critique de Loic3544 (Liffré (35), Inscrit le 1 décembre 2007, 46 ans) - 4 avril 2011
Ce 3° opus, qui s'ouvre sur un braquage de fourgon blindé en 64, est truffé de rebondissements. La 1° surprise du roman vient des personnages. On retrouve évidemment Wayne Tedrow Junior, qui devra composer entre ses actes de la fin de American Death Trip et son boulot pour la Mafia ainsi que pour Howard Hugues. Il y a aussi Don Crutchfield (inspiré d'un personnage réel), jeune homme ambitieux mais qui parait bien tendre pour l'univers dans lequel il va être plongé. Dès le départ, on sent que ça risque de mal finir pour lui. Le 3° larron est une énorme surprise, j'ai failli en faire tomber mon bouquin. On retrouve l'un des seconds rôles les plus antipathiques du volume précédent. Même de la part d'Ellroy, c'est assez déroutant. Evidemment, Ellroy saura trouver les bons côtés de ce personnage pour qu'on finisse par l'apprécier.
Comme d'habitude chez Ellroy, l'écriture est saccadée, le rythme rapide, la tension présente en permanence et chaque détail compte. Prenant appui sur des seconds rôle très présents, obnubilés par le souvenir de ce braquage, Ellroy nous emmène dans une intrigue incroyable où les fils s'emmêlent pour ne se révéler complètement qu'à la fin. En ce sens, on retrouve les ficelles habituelles d'Ellroy, mais celles qu'il utilisait dans le quatuor de Los Angeles. D'ailleurs le roman est bien plus un polar qu'un roman politique comme pouvaient l'être les deux précédents. On perd ce côté original et on gagne une intrigue plus intéressante. Comme je l'ai dit, les seconds rôles sont primordiaux dans ce roman. On a évidemment l'habitude de cela chez Ellroy, mais, dans Underworld USA, c'est très marqué : certains sont très proches des héros, on en découvrira d'autres au travers de journaux intimes, et le principal d'entre eux se découvrira au fur et à mesure.
Après Cuba dans American Tabloïd, après le Vietnam dans American Death Trip, c'est la Républicaine Dominicaine qui se retrouve au coeur de ce roman. Nouvel El Dorado pour la Mafia, nids de Rouges réprimé par le nouveau président, soutien de Nixon pour l'ouverture d'hôtels-casinos, ce pays jouera un rôle central dans ce roman. Côté politique, on retrouve bien évidemment John Edgar Hoover, le grand patron du FBI. Mais c'est un Hoover sur le déclin que nous peint Ellroy. A certains moments, il dit des choses fausses avec un tel aplomb que j'étais persuadé que je me souvenais mal de certains détails. Mais non, c'est juste la folie qui gagne Hoover. C'est extrêmement déroutant pour le lecteur.
Un meurtre sanglant, un personnage féminin énigmatique, un jeune "bleu" trop sûr de lui, 2 vieux de la vieille à qui on ne la fait pas, un nouveau terrain de jeux pour la Mafia, un braquage non résolu qui résonne dans tout le bouquin, voilà les ingrédients du dernier volume de cette trilogie. Personnellement plus amateur des polars que du côté politique des romans de Ellroy, j'ai été emporté dans cette histoire. Certes, la pléthore de détails fait que l'on décroche à certains moments, mais l'intrigue nous tient quand même jusqu'au bout. Un livre que je recommande donc chaudement à ceux qui n'ont pas peur des lectures un peu exigeantes.
Encore chapeau bas, monsieur Ellroy
Il était temps que cela se termine
Critique de Playmobil (, Inscrit le 1 octobre 2004, 49 ans) - 19 mai 2010
Ce 3ème volume me laisse un sentiment mitigé. L'intrigue est comme toujours prenante et le roman se dévore si vous appréciez l'univers d'Ellroy.
Le problème vient plutôt de la dernière partie du roman qui donne l'impression de tenter de donner une fin conventionnelle à une trilogie qui ne le justifiait pas nécessairement.
Il n'en reste pas moins que cette trilogie est fascinante. L'imbrication minutieuse des personnages fictifs, des anecdotes people invérifiables et des événements historiques revisités donne une version de l'histoire contemporaine des USA à la fois totalement imaginaire et tellement plausible qu'on pourrait y croire.
C'est vraiment le tour de force d'Ellroy..
Je conseille vivement de lire toute la trilogie ( American Tabloid, American Death Trip, Underworld USA ) et en aucun cas de commencer par celui-ci ..
Le moins bon de la trilogie ?
Critique de CptNemo (Paris, Inscrit le 18 juin 2001, 50 ans) - 25 mars 2010
Alors je ne vais pas m’appesantir sur l'histoire, la trilogie c'est un peu l'histoire secrète des USA entre l'assassinat de JKF et la mort de John Edgard Hoover, le récit de la collusion entre mafia, politique et FBI de 1962 à 1972. Mais c'est une histoire réinventée (qui n'a pas la prétention de décrire la réalité donc) et surtout vue par les seconds couteaux, les hommes chargés des basses besognes. Underworld USA traite la période 68-72, après les assassinats de Martin Luther King et Robert Kennedy.
Underworld USA est articulé autour de 3 personnages principaux : Wayne Tedrow Jr nervi de Howard Hugh, de la mafia et un peu du FBI, Dwight Holy le spécialiste en coups fourrés de John Edgar Hoover et Crutchfield, jeune privé un peu miteux et de tempérament voyeur qui va découvrir les coulisses de l'histoire américaine. Comme d'habitude chez Ellroy les personnages principaux sont amenés à commettre des actions qu'ils regrettent et sont hantés par le doute et l'idée de rédemption. Mais j'ai trouvé que cette fois cela fonctionnait moins bien que d'habitude, la faute à mon avis à l'énorme machinerie narrative qu'Ellroy a déployée. Car l'intrigue est incroyablement dense, complexe, touffue.
Le livre s'ouvre sur un braquage en 1964 qui servira de pivot au roman, la plupart des personnages gravitant de près ou de loin autour de ce braquage. Ellroy lance différentes intrigues autour de différents personnages et petit à petit rapproche les fils de son récit jusqu'à tisser un fil unique. Avec maestria. Difficile de lire trop vite sans passer à côté d’un complot, d’un petit détail qui prendra tout son relief 200 pages plus tard. Le récit est d’une densité et d’une complexité assez incroyable magistralement construit. Un vrai travail d’orfèvre.
Mais cette densité se paye au prix de l’intensité. L’ensemble m’a semblé moins fort que d’habitude, la tension dramatique plus lâche et je n’ai pas été emporté comme d’habitude par le récit. La faute aussi à des personnages moins attachants et parfois assez peu crédible. On a par moment du mal à comprendre ce qui les motive et le pourquoi de leur choix. Du coup on les regarde passer mais sans vraiment s’attacher sauf peut être dans le cas de Crutchfield, personnage le plus réussi (et sans doute le plus proche de l’auteur).
Après le choc de American Death Trip au style haché, cassé, Underworld USA marque un retour à un style plus fluide et plus classique. Vu la densité de l’intrigue ça n’est pas forcement un mal mais quand on enchaîne les deux romans, ce changement peut décevoir et participe à ce sentiment mitigé que m’a laissé le livre.
Alors certes Underworld USA n’est pas un mauvais roman, loin de là. C’est un excellent roman historique (plus qu’un polar), bien écrit, à l’intrigue dense et riche sur une période complexe de l’histoire des USA. Mais Ellroy a peut être perdu en route un peu de ce qui fait son charme : l’intensité dramatique, des personnages complexes et attachants, le côté coup de poing dans la gueule. Il devrait peut être méditer cette maxime « Less is more »
Et à titre personnel j'ai hâte que James retourne au polar (ce qui est prévu normalement)
Fin d'une trilogie...
Critique de Tanneguy (Paris, Inscrit le 21 septembre 2006, 85 ans) - 8 février 2010
Le style est toujours violent, parfois confus et ne laisse pas indifférent. J'ai personnellement apprécié les passages consacrés à Haïti et St Domingue. La situation, surtout à l'époque, était passablement embrouillée et ne semble guère s'être améliorée depuis. Le récent séisme n'a sûrement rien arrangé.
On râle souvent en lisant ce livre, on veut l'abandonner, mais finalement on ne le lâche pas avant la dernière ligne.
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