La débâcle de Émile Zola

La débâcle de Émile Zola

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Jules, le 16 novembre 2001 (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 10 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (3 742ème position).
Visites : 12 432  (depuis Novembre 2007)

Le désastre !

Nous sommes en 1870 et la France de Napoléon III, baptisé « Badinguet » par Victor Hugo, se retrouve face à Bismarck, et la Prusse, qui va se servir de la guerre contre la France pour créer une vraie Allemagne.
Napoléon III se retrouve embarqué dans cette guerre suite à « la dépêche d’Ems », document falsifié par ailleurs pour le rendre plus insultant. Il est le (petit) vainqueur de Solferino, a reçu une dégelée au Mexique, mais se croit le digne successeur de Napoléon I.
Le réveil n’en sera que plus brutal ! Mac Mahon reçoit une raclée des troupes prussiennes qui se pointent vers le territoire français. Les chemins sont pleins de soldats perdus qui ont abandonné leurs fusils en route. L’armée française se regroupe à Sedan et y connaîtra le désastre ! La route de Paris est ouverte aux Prussiens, qui s’y engouffreront.
Zola nous décrit l'horreur des batailles et des champs de bataille après la défaite : des amas de corps humains mêlés aux cadavres des chevaux et les pièces d'artilleries détruites. Il nous raconte la fuite des populations devant les « Huns », avec tout ce qu’elles peuvent emporter, les routes encombrées, bouchées, et qui empêchent les troupes de se reformer. C’est la grande débâcle qui va précipiter la fin. Plus personne ne retrouve son régiment, ses officiers, ni les directions à suivre.
Napoléon III, fait prisonnier à Sedan, sera déchu et rejoindra l'Angleterre. Thiers dirigera le nouveau gouvernement, qui s’installera à Versailles et Paris va se révolter. Ce sera la révolte de la commune que Thiers et ses « Versaillais » vont écraser dans un gigantesque bain de sang !…
Zola nous donne ici un roman d'un réalisme fou, parcouru d'images puissantes, désolantes, pitoyables, horribles… Le roman se compose de dizaines de personnages et son écriture est telle que, par moment, nous avons la sensation de voir des images sur un grand écran.

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Mort de l'Empire

6 étoiles

Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 4 février 2022

L'action se déroule autour de Sedan du 6 août 1870 à mai 1871. Puis à Paris.
La première partie du roman aboutira sur la semaine "sanglante" de la guerre Franco-Prusse qui provoquera la fin de l'empire.
Jean et Maurice sont dans le même peloton et peu à peu leur amitié se forme. Ils sont désabusés de l'inorganisation des officiers. Ordre et contrordre, intendance défaillante face à un ennemi froid et déterminé.
L'armée française est laminée.
Les prisonniers sont emmenés à la presqu’île d’Iges. Dans des conditions dantesques. Dénutris, ils doivent se préparer à prendre la route pour l'Allemagne. C'est de ce convoi que les deux amis réussiront à s'enfuir. Hélas, dans la fuite Jean est blessé.

J'ai eu quelques difficultés à m'accrocher au texte et ce n'est pas le meilleur de la série.
Il est cependant l’incroyable ressemblance avec les faits de commandement qui eurent lieu lors de la grande guerre de 1914, quelques décennies plus tard.

LES PERSONNAGES PRINCIPAUX

JEAN MACQUART
Déjà croisé dans la terre où son épouse Françoise s'était fait assassinée par sa sœur et son mari. Il avait tout abandonné pour s'engager à l'armée. Il participa à la guerre d'Italie.
Comme caractère, un garçon un peu lourd, raisonnable, sachant lire et écrire, un peu compter, menuisier de son état, paysan plus tard. Tempérament équilibré, avec une pointe d’égoïsme peut-être. Ayant beaucoup souffert, ce qui lui a donné de l’expérience.
Quand l'heure d'un nouvelle guerre contre les prussiens sonne il se réengage.

MAURICE LEVASSEUR
Incorporé dans l’escouade du caporal Jean Macquart, une répugnance, une sourde révolte l’a, dès les premières heures, dressé contré cet illettré, ce rustre qui le commande. Un peu plus tard, dompté par lui, il le hait d’une inextinguible haine. Puis, un jour de défaillance, Jean lui rend l’espoir par sa virulence contre les lâches qui parlent de ne pas se battre ; les mêmes fatigues et les mêmes douleurs, subies ensemble, font vaciller sa rancune ; il y a entre eux comme une trêve tacite. À ce moment, l’armée de Châlons, reconstituée à la hâte après les premières déroutes, n’est plus que l’armée de la désespérance, le troupeau expiatoire qu’on envoie au sacrifice, pour tenter de fléchir la colère du destin ; elle monte son calvaire jusqu’au bout, payant les fautes de tous, du flot rouge de son sang, grandie par l’horreur même du désastre. Depuis six semaines, Maurice n’a fait qu’user ses pauvres pieds d’homme délicat à fuir et à piétiner loin des champs de bataille. Il est redescendu à une égalité bon enfant, devant les besoins physiques de la vie en commun. Épuisé de lassitude, blessé au pied, il éprouve un profond sentiment de reconnaissance pour les soins maternels de Jean, un attendrissement invincible l’envahit, le tutoiement monte de son cœur à ses lèvres, dans un immense besoin d’affection, comme s’il retrouvait un frère chez ce paysan exécré autrefois, dédaigné encore la veille.


LES PERSONNAGES PAR ORDRE ALPHABETIQUE


Adolphe
Bastian
Beaudoin
Bourgain-Desfeuilles (Général)
Bouroche
Cabasse
Chouteau
Combette
Combette (Mme)
Coutard
Dalichamp
Delaherche (Jules)
Delaherche (Mme)
Desroches
Desroches (Mme)
Dubreuil
Ducat
Fernand
Fouchard
Fouchard (Honoré)
Gartlauben (De)
Gaude
Gunther (Otto)
Gutmann
Ladicourt (Baronne de)
Lagarde (Edmond)
Lapoulle
Laurent
Lefèvre (Mme)
Levasseur
Levasseur (Henriette)
Levasseur (Maurice)
Loubet
Louis
Macquart (Jean)
Maginot
Morange (Charlot)
Morange (Silvine)
Pache
Pauvre Enfant
Picot
Quittard (Auguste)
Quittard (Françoise)
Ravaud
Rochas
Rose
Sambuc (Guillaume)
Sambuc (Prosper)
Sapin
Simonnot
Steinberg (Goliath)
Vineuil (Colonel de)
Vineuil (Commandant de)
Vineuil (Gilberte de)
Weiss
Zéphir

La guerre sous toutes les coutures

10 étoiles

Critique de Kalie (Sarthe, Inscrit le 4 juillet 2010, 54 ans) - 6 mars 2019

Pour une fois chez Zola, je trouve que la documentation accumulée par l'auteur (les noms des villages, la topographie, les dates des évènements, les mouvements de troupes, les noms des généraux, les noms et les numéros des corps d'armée, des divisions, des régiments…) étouffe par moments la fiction. Cependant, les descriptions minutieuses de la composition des batteries et du fonctionnement de chaque arme (infanterie, cavalerie, artillerie…) s’avèrent des plus passionnantes. Le destin des personnages fictifs ou, et c’est l’originalité ici, historiques, est comme toujours chez Zola émouvant. Si au début, je me suis un peu retrouvé dans la position des soldats français : c’est-à-dire dans l’attente d’action ; dès que l’enfer des combats commence, impossible pour moi de quitter le livre. D’autant que Zola tire à boulets rouges (c’est le cas de le dire) sur l’armée française, loin de son ancienne gloire (notamment de la Grande Armée de Napoléon 1er). La comparaison avec l’armée allemande ne joue vraiment pas en notre faveur. Les passages sanglants sur les atrocités des champs de bataille sont de plus en plus nombreux au fil du récit. Le chapitre six de la deuxième partie du roman qui décrit en détail les horreurs de l’ambulance avec ses blessés à soigner m’a particulièrement marqué (descriptions crues des blessures, amputations, charnier…). Même la bataille de Sedan terminée, les détails macabres continuent comme ces soldats semblant de loin festoyer autour d’une table mais en réalité cadavres atrocement mutilés, probablement ramassés et disposés ainsi par les Prussiens « par moquerie de la vieille gaieté française ». L’auteur évoque la terre infestée par les morts vite enterrés ou La Meuse empoisonnée pour longtemps par les corps gonflés des chevaux et des hommes en putréfaction. Puis vient l’horreur de la captivité des soldats français sur la presqu’île d’Iges (faim, maladies, cruautés et humiliations), suivie du siège de Paris et de la Commune (l’incendie de la capitale, les exécutions arbitraires…) jusqu’à la magnifique conclusion de Zola à la fois douloureuse, fataliste, et pleine d’espoir.

Un gros morceau qui a bien sa place dans le cycle

8 étoiles

Critique de Warrel62 (, Inscrit le 30 mars 2013, 54 ans) - 5 avril 2013

Zola exagère : déjà 18 tomes à se taper depuis "La Fortune des Rougon" et celui-là sera le plus long, mince. Surtout qu'est ici y concernée la guerre de 1870, celle pour laquelle le français (sur ce site je dirais le francophone) moyen, qui oublie déjà progressivement la guerre 14-18, n'a vraiment que faire.
L'intérêt de ce livre est qu'en plus d'être un roman et donc une histoire, il est aussi un peu l'Histoire elle-même. La guerre de 1870, absurde comme toutes les guerres, y est décrite sans concession, un peu comme lorsque Spielberg décrit le débarquement dans le soldat Ryan. Et comme le font remarquer à juste titre certains de mes prédécesseurs, "l'on s'y croirait", et Zola n'oublie évidemment pas sa restitution de la Commune de Paris, en apothéose.
Alors bien sûr c'est un pavé, et ce n'est pas glamour comme du Musso, du Nothomb ou du Harlan Coben, mais c'est un Zola que l'on ne peut considérer comme dispensable, comme certains dans le cycle. Et s'il n'est, selon moi, pas dans le top 5 des Rougon-Macquart, il n'en est pas bien loin.

Tout comme Jules...

8 étoiles

Critique de Benoit (Rouen, Inscrit le 10 mai 2004, 43 ans) - 25 juin 2004

Ce qui frappe dans ce roman de Zola, ce sont les descriptions des batailles qui m'ont laissé le souffle coupé et qui m'ont laissé une impression de gâchis (voire d'absurdité) tellement l'impréparation des Français y est criante, et, bien sûr, un sentiment d'horreur à la peinture des scènes guerrières où on massacre à qui mieux mieux.
Puis c'est la Commune de Paris où les images de Paris en flamme nous frappent de plein fouet.

Bref, c'est un roman marquant qui m'a l'air de ne pas occuper la place adéquate dans la bibliographie de Zola.

Marseillaise

6 étoiles

Critique de Lucien (, Inscrit le 13 mars 2001, 69 ans) - 20 mai 2002

Dans la série "souvenirs d'enfance liés à la Marseillaise", Bolcho, je me souviens qu'une petite Française rencontrée voici quelques décennies avait suscité l'hilarité de ses proches en prononçant "allons enfants de la POITRINE, le jour de gloire est arrivé"... Sur la liaison, notre prof de musique certifiait qu'il fallait durcir la consonne, et nous ne prononcions jamais qu'"un sanQUimpur" (en roulant bien les R, d'ailleurs, suivant le technique des chanteurs d'opéra). Et puis, on pourrait évoquer aussi les scandales liés au chant patriotique par excellence, du "aux armes etcaetera" de Gainsbarre jusqu'aux deux Marseillaises sifflées du stade de France...

Un sanguin pur

7 étoiles

Critique de Bolcho (Bruxelles, Inscrit le 20 octobre 2001, 76 ans) - 20 mai 2002

Très pertinente, la critique éclair de Lucien (Lucien et moi sommes en train d'imposer peu à peu un nouveau sport olympique: le renvoi d'ascenseur...). Cette métaphore du sang fécondant était déjà depuis belle lurette un cliché d'ailleurs. "Qu'un sang impur abreuve nos sillons", ça ne vous dit rien? Comme quoi, pur ou impur, le sang est excellent pour les cultures... (j'ai appris la Marseillaise enfant, comme tous les pauvres petits Français, et la liaison appuyée "sang-impur" me posait un problème de compréhension à l'époque. J'aime à imaginer que je comprenais alors "un sanguin pur", ce qui éclaire la scène d'un jour nouveau)

Caricature

6 étoiles

Critique de Lucien (, Inscrit le 13 mars 2001, 69 ans) - 20 mai 2002

Très pertinente, la critique éclair de Bolcho. Ces gonflements journalistiques omniprésents ainsi que la construction stéréotypée des intrigues m'empêcheront toujours de considérer Zola comme un créateur de tout premier ordre. La phrase citée en conclusion est effectivement très frappante : «Des semences scélérates pour d'effroyables moissons!» Mais ici encore, il semble que Zola se caricature lui-même : "scélérates", "effroyables"... Les adjectifs sont si forts qu'ils en deviennent presque risibles. Et la métaphore de la semence pour évoquer le sang qui féconde la terre est présente, presque à l'identique, dans "La terre" ou, bien sûr, dans "Germinal".

Zola, faites-nous un papier !

7 étoiles

Critique de Bolcho (Bruxelles, Inscrit le 20 octobre 2001, 76 ans) - 18 mai 2002

Il y a peu, à propos de « l'Oeuvre », Lucien nous rappelait que Zola avait toujours hésité entre l’épique et le journalistique. Il nous disait aussi que « la Débâcle » appartenait à la seconde catégorie. C'est vrai jusqu’à la caricature. C'est avec une carte de France au 1/250 000e qu'il faut lire la chose (les graines de généraux opteront plus volontiers pour les cartes d'état-major, bien sûr). Zola ne nous fait grâce d’aucune marche ou contre-marche. Les personnages sont nombreux et c'est pour une raison bien simple. Chacun d'eux est un regard sur l'action. Il s’agit de couvrir (oui, journalistiquement) l’ensemble du théâtre des opérations et donc d'avoir de bons prétextes romanesques pour ce faire. La technique est là, les moments d'anthologie aussi (l'hôpital de campagne par exemple, scène difficile à soutenir), mais les personnages ne prennent pas corps, la technique laisse voir ses bâtis, ses ficelles, son squelette (et dans le genre production de squelette, Sedan a fait fort…). Bref, intéressant pour ce qu’on apprend de la bataille et surtout de l’art du roman. Je l'ai déjà dit, je sais, mais ce sont les romans ratés des bons auteurs qui nous procurent les meilleurs cours d'écriture romanesque. Pour quoi faire ? Pour dépiauter les romans réussis pardi. N'empêche, il y a tout de même plein de choses passionnantes, plein de matière à réflexion. Des curiosités de la langue comme ce « sirop de grenouille » qui désigne l’eau de consommation dont les hommes de troupes se délectent à l’étape. Dire qu'à cette époque, on disait « sirop de grenouille » pour faire moderne, créatif, puis que l'expression est sans doute devenue banale, usée, clichée au point de disparaître et nous réapparaître à nous, pleine de nouveauté retrouvée. Cela me fait penser à cette maison depuis longtemps en ruine sur laquelle on distingue encore, écrite à la peinture, la mention « cordonnerie moderne, anciens établissements Hector-chaussure ». Le temps passe. C'est avec du vieux qu’on fait du neuf et du neuf qu’on fait du vieux. Autre curiosité, le terme de « pétroleuse » qui nous vient de la Commune et qui désignait à l’origine des communardes dont les « Versaillais » disaient qu'elles enflammaient Paris en versant du pétrole sur les bâtiments. Voilà d'ailleurs un autre défaut du livre à mon avis : la Commune y est traitée un peu à la va-vite, mais, me direz-vous, Zola fait ce qu'il veut et je n'ai qu'à m'y mettre moi-même. Bon, si vous le prenez comme ça. On parle dans ce livre sans cesse de remparts. Eh oui, la disparition d'iceux est très récente finalement. L’idée d'intérieur/extérieur en est bouleversée. Et la sécurité/insécurité aussi. Le danger aujourd’hui est entré dans la ville. Ce sont bientôt les campagnes qui devront se murer pour s'isoler des villes. Mais les murs sont déjà dans nos esprits, n’est-ce pas ? Terminons par cette phrase terrible à propos du sang qui inonde la terre : « Des semences scélérates pour d'effroyables moissons ! ». Tiens ! «a pousse.

Du grand Zola

9 étoiles

Critique de Patman (Paris, Inscrit le 5 septembre 2001, 62 ans) - 20 novembre 2001

Un classique incontournable. Comme Germinal, la débâcle est un livre fort où, comme le fait remarquer Jules, on "voit" les événements comme si on y était. Etonnant d'ailleurs qu'il n'ait jamais été adapté au cinéma (du moins pas à ma connaissance). Il faut dire que Sedan est la plus grande défaite militaire que la France ait jamais subie.

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